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Réorganisation judiciaire, hypothèque légale et égalité des créanciers: quand la Cour constitutionnelle s'en mêle, R.D.C.-T.B.H., 2016/9, p. 821-828

CONTINUITÉ DES ENTREPRISES
Réorganisation judiciaire - Effets de la décision de réorganisation - Hypothèque légale
Durant la période sursitaire accordée au débiteur dans le cadre d'une procédure de réorganisation judiciaire, aucune saisie, qu'elle soit conservatoire ou d'exécution, ne peut être pratiquée par les créanciers sursitaires, qu'ils soient ordinaires ou extraordinaires.
L'hypothèque légale ne constitue pas une saisie au sens technique du terme. Tandis que la saisie immobilière conservatoire ne confère au créancier aucun privilège, une hypothèque a pour effet de reconnaître un droit réel au créancier qui fait procéder à son inscription et de lui donner un rang de créancier privilégié.
L'inscription d'une hypothèque légale par le fisc au cours de la période sursitaire d'une procédure de réorganisation judiciaire a pour effet, non d'ériger l'administration fiscale en créancier privilégié au moment où il y est procédé, mais de lui conférer ce rang au terme de la procédure et d'imposer aux créanciers qui ne disposent pas d'un tel privilège de n'être en situation de concours, qu'une fois le fisc désintéressé.
Le législateur a entendu donner à l'administration fiscale le rang de créancier ordinaire durant la période de sursis afin d'assurer l'égalité entre tous les créanciers intéressés par la procédure et de favoriser ainsi la continuité de l'entreprise.
En n'interdisant pas à l'administration fiscale, au cours de la période sursitaire, de prendre une inscription hypothécaire en vue d'être reconnue comme créancier privilégié à son terme, la disposition en cause porte atteinte de manière disproportionnée aux droits des autres créanciers dont la situation sera directement affectée par l'existence d'un tel privilège, en contrariété avec la volonté du législateur de protéger l'égalité des créanciers.
CONTINUÏTEIT VAN DE ONDERNEMING
Gerechtelijke reorganisatie - Gevolgen van de beslissing tot reorganisatie - Wettelijke hypotheek
Tijdens de periode van opschorting die aan de schuldenaar is toegekend in het kader van een procedure van gerechtelijke reorganisatie, kan geen enkel beslag, zowel bewarend als uitvoerend, worden gelegd door de schuldeisers in de opschorting, zowel gewone als buitengewone.
De wettelijke hypotheek vormt geen beslag in de technische betekenis van het woord. Terwijl het bewarend beslag op onroerend goed geen enkel voorrecht aan de schuldeiser verleent, heeft een hypotheek tot gevolg dat een zakelijk recht wordt toegekend aan de schuldeiser die ze laat inschrijven en dat hem vanaf die inschrijving een rang van bevoorrechte schuldeiser wordt verleend.
De inschrijving van een wettelijke hypotheek door de fiscus tijdens de periode van opschorting van een procedure van gerechtelijke reorganisatie heeft niet tot gevolg dat de belastingadministratie tot bevoorrechte schuldeiser wordt verheven op het ogenblik waarop daartoe wordt overgegaan, maar wel dat haar die rang na afloop van de procedure wordt verleend en dat aan de schuldeisers die niet over een dergelijk voorrecht beschikken, pas de mogelijkheid wordt geboden zich in een situatie van samenloop te bevinden zodra de fiscus is voldaan.
De wetgever heeft aan de belastingadministratie echter de rang van gewone schuldeiser tijdens die periode willen verlenen teneinde de gelijkheid te verzekeren tussen alle schuldeisers op wie de procedure betrekking heeft en teneinde aldus de continuïteit van de onderneming te bevorderen.
Door de belastingadministratie tijdens de periode van opschorting niet te verbieden een hypothecaire inschrijving te nemen om erna als bevoorrechte schuldeiser te worden erkend, doet de in het geding zijnde bepaling op onevenredige wijze afbreuk aan de rechten van de andere schuldeisers wier situatie rechtstreeks zal worden geraakt door het bestaan van een dergelijk voorrecht, in strijd met de wil van de wetgever om de gelijkheid van de schuldeisers te beschermen.
Réorganisation judiciaire, hypothèque légale et égalité des créanciers:
quand la Cour constitutionnelle s'en mêle
David Pasteger [1] et Fanny Rozenberg [2]
A. Les faits et la procédure à l'origine de l'arrêt annoté [3]

1.Le 12 mars 2012, la SPRL B., active dans le secteur Horeca, dépose une requête en réorganisation judiciaire au greffe du tribunal de commerce de Bruxelles. Le 30 mars, la procédure, qui tend à obtenir un accord collectif des créanciers, est déclarée ouverte. Trois jours plus tard, l'administration de la TVA procède, sur le pied de l'article 93ter du Code de la TVA, à la notification de diverses contraintes délivrées peu avant l'octroi du sursis. Sans surprise, le 10 avril, la même administration fait procéder, conformément aux articles 93quater et 93quinquies du Code de la TVA, à l'inscription de l'hypothèque légale pour sûreté d'une créance sursitaire de quelque 106.000 EUR sur l'immeuble de la SPRL B. Le mois suivant, l'administration notifie une nouvelle contrainte à son débiteur sursitaire pour un montant de quelque 19.000 EUR. Une seconde hypothèque légale, pour une somme équivalente, est inscrite la veille du vote du plan de réorganisation.

Le 5 mars 2012, le plan est approuvé par les créanciers et sera ensuite homologué par le tribunal de commerce. L'administration reconnaît que ses inscriptions hypothécaires, prises après l'ouverture de la procédure, ne lui confèrent pas, conformément à la jurisprudence majoritaire [4], le statut de créancier sursitaire extraordinaire. De même, la créance fiscale ne bénéficie pas encore, à cette époque, de la protection de l'article 49/1 LCE, qui sera inséré par la loi du 27 mai 2013 [5]. Dès lors, le plan prévoit que l'administration de la TVA, créancier sursitaire ordinaire, devra supporter un abattement à concurrence de 80% pour le montant principal de la dette et de 100% en ce qui concerne les majorations, alors même que d'autres créanciers sursitaires ordinaires bénéficient d'un meilleur traitement. Dans sa partie prescriptive, le plan mentionne également qu'une portion du prix de la réalisation, à intervenir, de l'immeuble dont la SPRL B. est propriétaire, sera affecté, après désintéressement des créanciers hypothécaires, au paiement accéléré des autres créanciers sursitaires selon un « coefficient accélérateur » réparti au prorata des créances.

En conséquence, la SPRL B. interpelle l'administration de la TVA en vue d'obtenir la mainlevée des inscriptions hypothécaires qui grèvent l'immeuble. Elle se heurte à un refus. L'administration ne manque pas de constater que les sommes qu'elle obtiendra en exécution du plan sont nettement inférieures, en raison des abattements votés et homologués, aux montants pour lesquels ses hypothèques sont inscrites. Se retranchant derrière son devoir de prudence, le fisc indique toutefois qu'il ne peut accorder la mainlevée sollicitée au motif que les inscriptions litigieuses « visent notamment à remédier aux conséquences d'une éventuelle inexécution du plan de réorganisation ou d'une révocation ultérieure de la procédure en réorganisation judiciaire ». Il précise néanmoins que la mainlevée interviendra dès que le plan aura été intégralement exécuté en ce qui concerne la créance fiscale.

2.La cause est portée devant le tribunal de commerce de Bruxelles. A l'appui de sa demande de mainlevée des inscriptions litigieuses, la SPRL B. affirme que les articles 30 et 31 LCE interdisent d'inscrire une hypothèque en cours de sursis. L'Etat belge rétorque que ces dispositions proscrivent uniquement les mesures d'exécution et les saisies conservatoires dirigées contre le débiteur sursitaire. Or, ajoute-t-il, une inscription hypothécaire n'entraîne pas d'indisponibilité du bien immobilier affecté, contrairement à une voie d'exécution ou à une saisie immobilière conservatoire, et ne peut donc être assimilée à celles-ci.

Concrètement, les inscriptions du trésor empêchent toutefois le débiteur de procéder aux paiements accélérés promis dans la partie prescriptive du plan. En effet, en cas de réalisation de l'immeuble, s'agissant d'une vente non purgeante, il serait délicat pour un notaire de libérer le prix d'acquisition sans avoir la certitude de procéder à une vente quitte et libre de toutes charges. L'administration s'en défend en indiquant qu'elle n'entend pas être payée intégralement mais seulement jusqu'à concurrence du montant qui, après abattements, est prévu par le plan. Les inscriptions hypothécaires légales, explique-t-elle, visent uniquement à prévenir un éventuel échec de la procédure de réorganisation judiciaire. Quant aux mesures promises par la partie prescriptive du plan en ce qui concerne la réalisation de l'immeuble hypothéqué, l'Etat belge souligne qu'il s'agit simplement d'une « possibilité d'accélération » des paiements et propose la solution suivante: le prix de réalisation de l'immeuble devra être affecté, après désintéressement des créanciers hypothécaires premiers inscrits, au remboursement de la créance de la TVA, compte tenu de l'hypothèque dont jouit cette dernière. L'administration précise toutefois qu'elle n'entend pas mettre à mal le plan. Elle ne sera ainsi payée qu'à hauteur des sommes prévues par celui-ci. Le surplus du prix de vente devra faire l'objet d'une consignation par le notaire instrumentant, dont le sort sera lié à l'exécution intégrale du plan. Et tant pis, croit-on pouvoir ajouter, pour les autres créanciers sursitaires ordinaires qui devront, pour leur part, attendre l'exécution complète du plan pour obtenir leurs tantièmes. Ensuite, poursuit l'administration, si le plan est respecté jusqu'à son terme, le débiteur sera libéré et pourra finalement empocher le solde consigné du prix de vente de son immeuble. A l'inverse, si le plan devait être révoqué - en raison donc d'un défaut d'exécution à l'égard des autres créanciers, puisque l'administration est déjà, à ce stade, désintéressée à hauteur des sommes prévues par le plan - alors le fisc retrouverait, conformément à l'article 58, alinéa 4, LCE, le droit de recouvrer l'intégralité de sa créance, en ce compris les sommes qui ont fait l'objet d'abattements. L'administration s'empresserait alors d'exécuter sa créance à nouveau exigible en totalité sur les sommes consignées par le notaire. Cette situation étonnante d'un débiteur confronté à une administration qui, d'une part, en qualité de créancier ordinaire, doit voir sa créance abattue à plus de 80%, mais qui, d'autre part, utilise des inscriptions hypothécaires pour garantir, jusqu'à exécution complète du plan, le paiement de l'intégralité de sa créance avant abattement, n'a toutefois pas ému le tribunal de commerce de Bruxelles. Par un jugement du 3 juillet 2013, la demande de mainlevée de la SPRL B. a été déclarée non fondée.

3.Saisie à son tour, la cour d'appel de Bruxelles commence par constater qu'aucune disposition de la loi sur la continuité des entreprises n'interdit explicitement d'inscrire une hypothèque en cours de sursis. L'arrêt poursuit néanmoins en soulignant que la volonté du législateur du 31 janvier 2009, exprimée dans les travaux préparatoires, consiste à « instaurer un traitement égal de tous les créanciers, qu'ils soient publics ou privés, et de faire en sorte que chacun de ces derniers apporte sa juste part au redressement de l'entreprise dans l'intérêt général » [6]. La cour relève également que plusieurs voix s'élèvent en doctrine pour assimiler, en comparant leurs effets respectifs d'indisponibilité sur le patrimoine du débiteur, l'inscription de l'hypothèque légale à une saisie « au carré » [7] ou, du moins, à une saisie conservatoire [8] proscrite, en cours de sursis, par l'article 31 LCE.

En conséquence, par son arrêt du 24 octobre 2014 [9], la cour d'appel interroge la Cour constitutionnelle sur l'éventuelle discrimination qui consisterait, suivant l'article 31 LCE, à interdire au cours du sursis les saisies conservatoires alors que l'inscription de l'hypothèque légale, qui emporte un effet similaire d'indisponibilité du bien grevé, reste pour sa part permise.

B. Le statut (non) privilégié de l'administration fiscale dans le cadre du sursis: bref rappel des épisodes précédents

4.Alors qu'elle bénéficiait d'un statut d'exception au sein de l'ancienne procédure concordataire, l'administration fiscale a été reléguée, par l'adoption de la loi du 31 janvier 2009, au rang de créancier sursitaire ordinaire [10]. L'article 2, d), de la LCE réserve en effet le statut d'extraordinaires aux seuls créanciers qui jouissent d'un privilège spécial, d'une hypothèque ou d'un droit de propriété. Ses privilèges généraux ne permettent donc pas au trésor d'échapper aux abattements prévus par un plan de réorganisation sur le pied de l'article 49 LCE.

Avant d'examiner la réponse réservée par l'arrêt examiné à la question de la cour d'appel de Bruxelles, il nous paraît utile de rappeler brièvement que l'administration fiscale a multiplié les initiatives procédurales afin de retrouver le statut préférentiel que lui refusent désormais les dispositions précitées [11].

a. Homologation du plan et ordre public

5.Pour mémoire, la première idée du trésor a consisté à s'emparer, entre autres moyens, de l'article 172 de la Constitution pour s'opposer à l'homologation de tout plan de réorganisation qui prévoit un quelconque abattement de créance fiscale. A l'appui de cette disposition constitutionnelle, aux termes de laquelle « nulle exemption ou modération d'impôt ne peut être établie que par une loi », l'administration arguait que la loi de 2009 ne comporte aucune dérogation suffisamment explicite au principe d'immuabilité de l'impôt. Cette interprétation n'a jamais été retenue par la jurisprudence [12]. Les arrêts prononcés par la Cour de cassation le 30 juin 2011 [13] et la Cour constitutionnelle le 18 janvier 2012 ont définitivement tranché la question au détriment de la thèse du fisc [14].

b. Statut extraordinaire de l'administration par inscription de l'hypothèque légale en cours de sursis

6.Mais le trésor avait plusieurs cordes à son arc. Déchu du statut de créancier extraordinaire à défaut de privilège spécial, ne lui suffisait-il pas d'inscrire, en cours de sursis, l'hypothèque légale, sur le pied des articles 425 du CIR ou 86 du CTVA, pour échapper aux abattements imposés par le plan? Non, a répondu la cour d'appel de Liège: si le sursis ne fait pas obstacle à l'inscription, la qualité du créancier, ordinaire ou extraordinaire, doit toutefois s'apprécier au jour du jugement qui octroie le sursis [15]. A défaut d'un privilège spécial rendu opposable au débiteur avant le sursis, l'administration fiscale ne peut s'élever au rang d'extraordinaire.

Cette interprétation jurisprudentielle a ensuite été ratifiée par le législateur via l'insertion du nouvel article 2/1 LCE par la loi du 27 mai 2013, qui dispose en substance que la nature, ordinaire ou extraordinaire, de la créance est déterminée au moment de l'ouverture de la procédure.

c. Inscription de l'hypothèque légale après le dépôt de la requête mais avant l'octroi du sursis

7.Le trésor n'avait pas dit son dernier mot. Si l'inscription hypothécaire qui intervient en cours de sursis est sans effet sur la qualité de la créance garantie au regard du plan, il reste loisible à l'administration fiscale d'inscrire l'hypothèque légale pendant la courte période, de 22 jours maximum [16], entre le dépôt de la requête en réorganisation judiciaire et le jour du prononcé du jugement qui la déclare ouverte. Prise avant l'ouverture de la procédure, l'hypothèque légale confère alors à la créance fiscale un caractère extraordinaire.

Rien n'interdit formellement une telle inscription puisque l'article 22 LCE, qui décrit les effets attachés au dépôt de la requête, prévoit uniquement qu'« aucune réalisation de biens meubles ou immeubles du débiteur ne peut intervenir à la suite de l'exercice d'une voie d'exécution » [17]. Relevons par ailleurs que, contrairement au sursis, le seul dépôt de la requête ne fait pas obstacle aux saisies conservatoires [18].

Cette nouvelle stratégie de l'administration a reçu un accueil mitigé en jurisprudence. S'appuyant sur l'opinion de S. Vanhaelst et M. Gossiaux, la cour d'appel de Mons a considéré qu'en procédant avec hâte à l'inscription hypothécaire, entre le dépôt de la requête en réorganisation et le jugement d'ouverture, dans le seul but d'échapper aux abattements auxquels les créanciers sursitaires ordinaires sont exposés, l'administration fait un usage abusif de son hypothèque légale [19]. D'autres juridictions ont, à l'inverse, estimé que, sauf circonstances particulières, une telle inscription n'avait, en soi, rien d'abusif [20]. C'est cette dernière position qu'a retenue la Cour de cassation, dans un arrêt du 30 octobre 2014 [21], aux termes duquel « une inscription hypothécaire prise après le dépôt de la requête en réorganisation judiciaire, mais avant le jugement déclarant ouverte la procédure, essentiellement pour permettre au trésor d'obtenir le statut de créancier sursitaire extraordinaire et, par voie de conséquence, de garantir le paiement intégral de ses droits plutôt que de subir, en sa qualité de créancier sursitaire ordinaire, un abattement de sa créance, ne détourne pas le droit de sa fonction et, partant, ne constitue pas un abus de droit ».

C. L'arrêt de la Cour constitutionnelle
a. L'assimilation de l'inscription hypothécaire à une saisie prohibée en période de sursis?

8.La Cour constitutionnelle commence par examiner la prémisse, erronée selon le Conseil des ministres, qui sous-tend la question préjudicielle: le droit d'inscription hypothécaire s'identifie-t-il en pratique, comme le laisse entendre la juridiction a quo, à une voie d'exécution ou, du moins, à une saisie conservatoire? Si tel est le cas, l'inscription hypothécaire devrait, à l'instar de ces dernières, être proscrite à compter de l'ouverture de la procédure de réorganisation sur la base des articles 30 et 31 LCE.

De l'étude comparée des règles applicables à ces différents mécanismes, la Cour déduit, de manière assez expéditive, que « l'hypothèque légale ne constitue pas une saisie au sens technique du terme »: la saisie immobilière conservatoire ne confère au créancier aucun privilège tandis que l'hypothèque constitue un droit réel et son inscription offre au créancier un rang privilégié. L'analyse de la Cour s'arrête aussi net.

9.C'est pourtant sous l'angle de l'effet d'indisponibilité sur le patrimoine du débiteur que certains auteurs proposent de comparer et, au terme de leur analyse, de rapprocher ces différents mécanismes légaux. Cette approche paraît judicieuse puisque le sursis tend précisément à offrir au débiteur un moratoire pendant lequel il peut disposer de ses biens afin de poursuivre et de réorganiser son entreprise.

J.-F. Van Drooghenbroeck, S. Jacmain et S. Brijs [22] considèrent que l'on peut assimiler la prise d'hypothèque légale à une saisie prohibée par l'article 31 LCE. Ces auteurs reprennent en substance, pour appuyer leur propos, la motivation d'un jugement du tribunal de commerce de Liège [23] du 21 décembre 2010, aux termes duquel « l'inscription hypothécaire légale la rend opposable aux tiers. Cette inscription ne constitue pas en elle-même une mesure d'exécution, en ce que cette seule inscription ne permet pas à l'Etat belge d'obtenir paiement de sa créance. Il s'agit cependant d'un préalable obligé à l'exécution. En fait, la constitution d'une garantie réelle n'a de sens que dans l'optique de la réalisation du bien grevé [24]. Cette mesure doit à tout le moins être considérée comme une saisie conservatoire interdite par la combinaison des articles précités. La faculté pour le tribunal d'accorder mainlevée des saisies s'applique à toutes les formes de saisies. Or, avec le professeur Georges, il faut se poser la question suivante: 'qui ne voit, en effet, que cette hypothèque légale est une saisie au carré, puisque non seulement elle provoque une indisponibilité de fait équivalente dans ses effets à celle attachée en droit à la saisie immobilière conservatoire, mais confère également à l'administration fiscale une cause de préférence, ce double effet étant de surcroît obtenu sans contrôle judiciaire préalable?' (…) La LCE a veillé à proscrire toute saisie à compter de l'ouverture de la procédure et toute mesure pouvant entraver la continuité de l'entreprise (…) ».

W. David [25] et A. Zenner partagent également l'opinion précitée [26]. Ce dernier auteur souligne qu'une telle interprétation trouve appui dans la jurisprudence de la Cour constitutionnelle. En effet, par son arrêt du 4 février 2010 [27], celle-ci a jugé que l'article 24bis de la loi sur les faillites - qui interdit, dès le jugement déclaratif de faillite, les voies d'exécution à l'égard des sûretés personnelles du failli -, viole le principe d'égalité en ce qu'il ne s'applique pas à la cession de rémunération alors même que, selon la Cour, il n'y a pas lieu d'assimiler la cession de rémunération à une voie d'exécution.

Les faits qui sont à l'origine de la question préjudicielle annotée ne constituent-ils pas, d'ailleurs, une belle illustration de l'effet d'indisponibilité sur le patrimoine du débiteur décrit par ces auteurs? En l'espèce, l'inscription de l'hypothèque légale empêchait concrètement le débiteur de procéder au remboursement accéléré, promis par le plan de réorganisation, au moyen des deniers dégagés par la réalisation de son immeuble.

10.Ces positions doctrinales n'ont pas trouvé un large écho auprès des cours et tribunaux. Ainsi, le tribunal de commerce d'Anvers a, par jugement du 30 novembre 2011, refusé la mainlevée d'une inscription hypothécaire pendant le sursis [28]. Après avoir rappelé que la prise d'hypothèque légale ne s'apparente nullement à une mesure d'exécution ou à une saisie, le tribunal justifie sa décision en considérant que l'hypothèque légale existait de plein droit dès la naissance de la taxe, soit avant l'ouverture de la procédure de réorganisation judiciaire. Il ajoute que l'inscription hypothécaire n'est que l'accomplissement d'une mesure de publicité nécessaire à l'opposabilité aux tiers et ne peut donc s'apparenter à une mesure d'exécution prohibée [29].

Dans le même sens, par l'arrêt précité du 24 janvier 2012 [30], la cour d'appel de Liège a considéré que l'hypothèque légale ne constitue pas une voie d'exécution prohibée et ne s'identifie pas à une saisie. Si l'arrêt annoté de la Cour constitutionnelle conforte cette jurisprudence, on ne peut s'empêcher de regretter que les arguments évoqués par la doctrine pour soutenir l'opinion inverse n'aient pas été examinés par la Haute Juridiction.

b. Quelle égalité pour les créanciers sursitaires?

11.A l'instar de la jurisprudence majoritaire, la Cour constitutionnelle n'a pas retenu l'assimilation, suggérée par les auteurs précités, de l'inscription hypothécaire à la saisie pour ce qui concerne les mesures prohibées en cours de sursis par les articles 30 et 31 LCE.

C'est au contraire sur le principe d'égalité des créanciers que la Cour appuie principalement son raisonnement pour refuser l'inscription de l'hypothèque légale en cours de sursis. Ainsi lit-on, sous le considérant B.14.3., qu'« en n'interdisant pas à l'administration fiscale, au cours de la période sursitaire, de prendre une inscription hypothécaire en vue d'être reconnue comme créancier privilégié à son terme, la disposition en cause porte atteinte de manière disproportionnée aux droits des autres créanciers dont la situation sera directement affectée par l'existence d'un tel privilège, en contrariété avec la volonté du législateur de protéger l'égalité des créanciers ».

12.On ne peut, en cette matière, évoquer le principe d'égalité sans penser immédiatement au concours entre créanciers dont il constitue le corollaire [31]. Pourtant, il est unanimement admis que le sursis offert au débiteur en réorganisation judiciaire n'implique pas de situation de concours [32].

L'arrêt annoté ne revient pas sur cet acquis. C'est en effet au concours qui interviendrait après la procédure que fait référence la Cour sous l'attendu B.14.1.: « l'inscription d'une hypothèque légale par le fisc au cours de la période sursitaire d'une procédure de réorganisation judiciaire a pour effet, non d'ériger l'administration fiscale en créancier privilégié au moment où il y est procédé, mais de lui conférer ce rang au terme de la procédure et ne permettre aux créanciers qui ne disposent pas d'un tel privilège d'être en situation de concours, qu'une fois le fisc désintéressé ». Pour saisir la portée de cet attendu, il faut, croyons-nous, garder à l'esprit les faits concrets qui ont animé les débats devant le tribunal de commerce et ensuite la cour d'appel. En l'espèce, la réalisation, par le débiteur, de l'immeuble grevé des hypothèques légales inscrites en cours de sursis devait, dans l'hypothèse optimiste (plan exécuté par le débiteur jusqu'à son terme), permettre à l'administration fiscale d'être payée dès la vente immobilière à concurrence de la totalité des sommes prévues par le plan plutôt que d'attendre l'exécution échelonnée de celui-ci, tandis que, dans l'hypothèse pessimiste (révocation du plan), l'administration retrouvait, comme tous les créanciers sursitaires, le droit d'exiger le paiement intégral de sa créance, hors abattements. Mais, à la différence des autres créanciers sursitaires ordinaires, le fisc pouvait obtenir immédiatement son désintéressement préférentiel grâce au solde consigné du prix de la vente immobilière. Comme le souligne la Cour constitutionnelle, l'inscription hypothécaire de l'administration fiscale a pour effet, en cas de révocation (future et éventuelle) du plan de réorganisation, d'offrir à l'administration une garantie réelle lui permettant d'échapper au concours avec les autres créanciers sursitaires ordinaires, devenus pour l'occasion chirographaires.

13.Mais quel est ce concours, auquel se réfère la Cour, qui interviendrait au terme de la procédure? D'une part, si le sursis débouche sur un plan de réorganisation qui est respecté jusqu'à son terme, aucun concours ne succèdera, fort heureusement, au sursis. D'autre part, parmi les divers scénarios d'échec de la procédure, la majorité n'implique pas, du moins pas immédiatement, qu'un concours prenne le relais du sursis. Ainsi, lorsque le débiteur renonce à la procédure conformément à l'article 40 LCE, seul un aveu de faillite, une mise en liquidation ou une citation en faillite ultérieure d'un tiers aboutira, le cas échéant, plusieurs mois après la fin du sursis, au concours. De même, en cas de refus d'homologation du plan sur la base de l'article 55, § 3, LCE, celui-ci n'emporte pas, de plein droit, la faillite du débiteur.

La fin du sursis ne rime donc pas nécessairement avec le début d'un concours. Même en cas d'échec de la procédure de réorganisation judiciaire, un concours n'interviendra, assez souvent, que plusieurs mois, voire, en cas de révocation du plan, plusieurs années après le sursis [33]. Or, pendant ce délai, il ne peut être question d'égalité des créanciers. Envisager une hypothèse de concours à l'issue de la période de sursis serait antinomique par rapport à l'objectif fondamental de la loi, à l'aune duquel doivent être lues ses dispositions, et qui tend à la pérennité des entreprises.

On peut dès lors s'étonner que la Cour constitutionnelle appuie son raisonnement sur l'égalité, pourtant hypothétique et hasardeuse, qui règnerait entre créanciers après la fin du sursis.

14.Comme dit précédemment, le sursis offert au débiteur en réorganisation judiciaire n'implique pas de situation de concours. Cette interprétation se fonde notamment sur un passage des travaux préparatoires de la loi de 2009 aux termes duquel « il n'existe pas de masse mais, simplement, une entreprise en activité. Si elle a des dettes, celles-ci sont traitées comme pour n'importe quelle entreprise (…) » [34]. I. Verougstraete en déduit qu' « aucune restriction n'est susceptible d'être apportée aux droits individuels des créanciers sauf si et dans la mesure où la loi le prévoit » [35].

La loi sur la continuité des entreprises comporte-t-elle, néanmoins, un principe général d'égalité qui s'imposerait aux créanciers pendant la période sursitaire? La Cour constitutionnelle l'affirme, sans ambages, sous le considérant B.14.3. précité. Elle fonde cette position sur les travaux préparatoires de la loi du 31 janvier 2009: « alors que le fisc était élevé au rang de créancier sursitaire extraordinaire par la loi relative au concordat judiciaire, la modification de ses droits par la loi en cause a été justifiée par le souci d'assurer dans le cadre des procédures visant au redressement de l'entreprise le traitement égal de tous les créanciers, qu'ils soient publics ou privés, et de faire en sorte que chacun de ces derniers apporte sa juste part au redressement de l'entreprise dans l'intérêt général » [36].

15.Pourtant, différents éléments permettent de s'interroger sur la portée d'une telle égalité des créanciers pendant le sursis, voire de douter de son existence.

D'abord, et c'est là l'argument majeur, le débiteur reste libre, en vertu de l'article 33, § 1er, LCE, de payer volontairement ses créanciers sursitaires pendant toute la procédure [37]. Le débiteur n'est nullement tenu, dans l'exercice de ces paiements, de respecter un quelconque ordre de privilèges [38] et, par voie de conséquence, une quelconque égalité entre les créanciers. Rien ne lui interdit d'ailleurs de concéder, pendant le sursis, une hypothèque ou une autre sûreté réelle en garantie de créances sursitaires [39]. Certes, depuis l'adoption de la loi du 27 mai 2013, l'article 33, § 1er, LCE précise que le débiteur peut procéder à un paiement volontaire uniquement dans la mesure où il « est nécessaire à la continuité de l'entreprise ». Cet ajout s'apparente toutefois à un voeu pieux du législateur puisque la loi n'indique, du moins spécifiquement [40], aucune sanction attachée au non-respect par le débiteur de cette nouvelle exigence.

Ensuite, s'agissant des créanciers institutionnels, le législateur semble, en adoptant l'article 49/1 LCE, inséré par la loi du 27 mai 2013 [41], être quelque peu revenu sur l'idée d'une réelle égalité effective entre créanciers publics et privés, qu'il postulait dans l'extrait précité des travaux préparatoires de la loi de 2009. Désormais, sauf à se prévaloir d'une « motivation stricte » faisant état « d'exigences impérieuses et motivées liées à la continuité de l'entreprise », le plan de réorganisation « ne peut accorder aux créanciers publics munis d'un privilège général un traitement moins favorable que celui qu'il accorde aux créanciers sursitaires ordinaires les plus favorisés ». En d'autres termes, l'administration fiscale et les autres créanciers munis d'un privilège général, pour autant qu'ils soient publics, devront être aussi bien traités que le créancier ordinaire le mieux traité.

Enfin, il est exact que la jurisprudence [42], au travers de la notion d'ordre public, s'est arrogé progressivement le droit de contrôler qu'une certaine égalité des créanciers était respectée dans les modalités de désintéressement prévues par le plan de réorganisation. Par son arrêt du 18 janvier 2012, la Cour constitutionnelle a encouragé cette pratique en jugeant que, « lorsque le plan de réorganisation prévoit un règlement différencié pour certaines catégories de créances, le tribunal de commerce doit examiner s'il existe une justification raisonnable à ce règlement différencié. Si tel n'est pas le cas, le tribunal doit en principe refuser l'homologation du plan de réorganisation » [43]. La formule a ensuite été reprise, à l'identique, par la Cour de cassation dans un arrêt du 7 février 2013 [44]. Cette pratique jurisprudentielle, qui consiste à évaluer le plan de redressement à l'aune du principe constitutionnel d'égalité, n'a pas été mise en cause par la loi du 27 mai 2013 et a même été en partie légalement consacrée. Les travaux préparatoires soulignent toutefois que le juge dispose, à cet égard, « d'une marge d'appréciation limitée. (…) L'intention n'est pas que le juge s'assoie à la place des créanciers et des travailleurs. Par contre, si le débiteur a l'intention de favoriser certains créanciers de manière à obtenir ainsi une majorité pour ses propositions sans qu'il y ait un objectif de sauvetage fondamental de l'entreprise, le juge peut intervenir car l'ordre public économique est susceptible d'être mis en péril de la sorte » [45]. Le principe reste donc le suivant: le débiteur est libre de faire les propositions qu'il entend et, dans les limites prévues par l'article 49/1, de traiter ses créanciers de manière différenciée. Ensuite, le tribunal, par le biais d'un contrôle marginal, vérifie que les éventuelles différences de traitement n'entravent pas, faute de motifs raisonnables, l'ordre public.

16.A la lumière de ces éléments, on peut douter qu'il existe, pendant le sursis, un principe général d'égalité duquel pourraient être déduites, à la manière d'un concours, des restrictions aux droits des créanciers non prévues spécifiquement par la loi [46].

C'est pourtant, à s'y méprendre, à une telle conclusion que paraît aboutir la Cour constitutionnelle lorsqu'elle prohibe l'inscription de l'hypothèque légale en cours de sursis au nom de l'égalité des créanciers et d'un hypothétique futur concours.

Dans le cas d'espèce qui lui était soumis, l'inscription de l'hypothèque légale était sans conséquence notable pendant le sursis. C'est à l'issue de celui-ci qu'elle prenait toutefois tout son sens: d'abord en créant une indisponibilité de l'immeuble grevé qui empêchait le débiteur de réaliser son bien pour accélérer l'exécution du plan; ensuite en assurant à l'administration un privilège, en cas d'échec du plan, dans l'éventuel concours qui s'ensuivrait. En schématisant, sans doute à outrance, on pourrait résumer le raisonnement de la Cour constitutionnelle comme suit: dans le cadre de la future - et hypothétique, pensons-nous juste d'ajouter - faillite du débiteur, l'égalité s'imposera aux créanciers; or, durant le sursis, une certaine forme, au moins embryonnaire, d'égalité existe déjà entre les créanciers; par conséquent, les créanciers sursitaires ne peuvent prendre, au cours du sursis, une mesure qui, telle l'inscription hypothécaire, aura pour conséquence de leur offrir une position privilégiée lors de la future, et toujours aussi incertaine, faillite.

17.L'on n'osera toutefois pas affirmer que telle fut l'analyse de la Cour constitutionnelle. En effet, celle-ci n'aurait assurément pas omis d'inclure dans son raisonnement les points qui suivent. Primo, la survenance d'une faillite n'interdit nullement à l'administration fiscale, sur pied de l'article 427, alinéa 4, du CIR 1992, d'inscrire l'hypothèque légale pendant la période suspecte et même après le jugement déclaratif de faillite [47]. Secundo, il n'y a pas, comme cela a été évoqué, de lien nécessaire entre le terme d'une réorganisation judiciaire et la naissance successive d'un concours. De plus, de la fin du sursis à la naissance éventuelle du concours, un certain délai, parfois long, peut intervenir, sans qu'il soit, pendant cette période, question de respecter l'égalité des créanciers. Tertio, comme on l'a montré, le sursis n'entraîne pas l'application d'un principe général d'égalité des créanciers tel que pourraient en découler des restrictions aux droits des créanciers non prévues par la loi. A défaut, ne faudrait-il pas, alors, contre l'opinion générale et celle des travaux préparatoires de la loi de 2009, voir dans ce sursis un nouveau concours?

D. Conclusion

18.Le complexe de faits à l'origine de l'arrêt annoté place un débiteur sursitaire face à l'attitude courtelinesque d'une administration fiscale dont on ne compte plus les coups de boutoir déjà assénés à la loi sur la continuité des entreprises. Manifestement interpellée par cette situation, la Cour constitutionnelle s'est vue offrir l'occasion de régler la question sous l'angle de l'assimilation de l'inscription hypothécaire à une saisie conservatoire, prohibée en période de sursis. La Haute Juridiction a choisi de ne pas retenir cette approche, lui préférant la ritournelle de l'égalité des créanciers.

L'argument aurait sans doute été louable si, d'égalité des créanciers en période de sursis, il pouvait être question sans risquer de jeter une ombre sur l'enseignement que tirait I. Verougstraete dans les premiers commentaires de la loi de 2009: « la discussion plutôt byzantine sur le concours dans le concordat - menée par la doctrine - n'a plus de portée à supposer même que cette discussion eût jamais fait sens. Ce qu'est le concours est défini par la doctrine en fonction de l'effet que l'on souhaite attacher à ce concept, et constitue un paradigme de raisonnement tautologique. La nouvelle loi décrit les droits des créanciers et les droits du débiteur et ne laisse plus d'espace à une notion abstraite de concours devant laquelle céderait ou plierait la réglementation organisée par le législateur. Les théories du concours n'ont pas de place dans un texte de loi positive: le concept est aussi vague et multiple que celui d'ordre public, mais n'a pas d'utilité réelle dans ce contexte » [48].

Or, que décide l'arrêt annoté, si ce n'est d'imposer une restriction aux droits des créanciers au nom d'un principe général, dont on peut pourtant douter de l'existence, d'égalité des créanciers sursitaires? Un tel raisonnement ne fait-il pas retomber la réorganisation judiciaire dans le raisonnement tautologique que dénonce I. Verougstraete? Le sursis impose des restrictions aux droits des créanciers, donc il existe un principe général d'égalité des créanciers (autrement appelé concours), duquel se déduisent … des limitations aux droits des créanciers.

Fort heureusement, telle n'est pas, selon nous, la portée de l'arrêt annoté, dont on préfèrera, sans s'encombrer des motifs sibyllins, ne retenir que l'enseignement du dispositif: l'administration fiscale ne peut inscrire son hypothèque légale en cours de sursis.

[1] Collaborateur scientifique à l'ULg, substitut du procureur du Roi de Liège.
[2] Assistante à l'ULg, avocate au barreau de Liège.
[3] Pour un commentaire de cet arrêt, voy. M.-C. Ernotte, « Discrimination, vous avez dit discrimination? Comme c'est bizarre! », J.L.M.B., 2016/23, pp. 1065 à 1070.
[4] Voy. not. Liège, 24 janvier 2012, J.L.M.B., 2012, p. 1376; NJW, 2012, p. 392, note P. Hannes, qui confirme Comm. Liège, 29 juin 2010, D.A.O.R., 2011, p. 148. Contra, voy. Comm. Termonde, 24 mai 2012, R.D.C., 2013, p. 59. Cette jurisprudence liégeoise a été confirmée par le législateur lors de l'adoption du nouvel art. 2/1 LCE; voy. infra, n° 6.
[5] Art. 27 de la loi du 27 mai 2013 modifiant diverses législations en matière de continuité des entreprises (M.B., 22 juillet 2013).
[6] Doc. parl., Chambre, sess. ord., n° 52-160/02, p. 45. Volonté sur laquelle le législateur reviendra quelque peu lors de l'adoption de la loi de réparation du 27 mai 2013, notamment au travers du nouvel art. 49/1 LCE; voy. infra, n° 15.
[7] F. Georges, « Demande en mainlevée de l'hypothèque légale en matière de T.V.A.: devant quel juge et sur quel(s) fondement(s)? », J.L.M.B., 2008, p. 1284.
[8] J.-F. Van Drooghenbroeck, S. Jacqmain et S. Brijs, « Un peu de droit judiciaire… », in Actualité de la continuité et continuité de l'actualité - Etats généraux de la continuité de l'entreprise, Bruxelles, Larcier, 2012, p. 226.
[9] Bruxelles, 24 octobre 2014, J.L.M.B., 2015, p. 555.
[10] M. Grégoire, « Le sort des créanciers et leurs garanties », in L'entreprise en difficultés: solution et nouveaux outils juridiques, Coll. Ateliers des FUCaM, Louvain-la-Neuve, Anthemis, 2009, pp. 33 et s.
[11] Pour une étude détaillée de la position du fisc dans le cadre de la loi du 31 janvier 2009, voy. M. Simonis, « Réorganisation judiciaire et protection des créances fiscales: affaire classée? », J.T., 2012, pp. 121-124; J. Renard et W. David, « Le fisc et l'ONSS: des créanciers sursitaires ordinaires? C'est extraordinaire! » (note sous Comm. Nivelles, 21 septembre 2009), J.L.M.B., 2010, pp. 383-385. Voy. aussi S. Jacqmain et C. de Boe, « L'article 37 de la loi sur la continuité des entreprises: nouveaux développements et mise en perspective au regard de la responsabilité - en particulier en matière fiscale et sociale - des dirigeants d'entreprise », R.D.C., 2015, pp. 526 et s.
[12] Gand, 28 juin 2010, T.G.R.-T.W.V.R., 2011, p. 43; Bruxelles, 11 mars 2010, J.L.M.B., 2010, p. 1385; Liège, 24 mars 2011, J.T., 2011, p. 468, note A. Zenner; Comm. Liège, 8 décembre 2009, J.T., 2010, p. 166; Comm. Neufchâteau, 15 décembre 2009, J.T., 2010, p. 165; Comm. Nivelles, 21 décembre 2009, J.T., 2010, p. 162.
[13] Cass., 30 juin 2011, J.T., 2012, p. 131; R.G.C.F., 2011, p. 411, note N. Pirotte.
[14] C.C., 18 janvier 2012, arrêt n° 2012/008, J.T., 2012, p. 125, note Rigaux; D.A.O.R., 2012, p. 352, note J. Brondel; R.D.C., 2012, p. 435, note I. Verougstraete et A. Van Hoe.
[15] Liège, 24 janvier 2012, J.L.M.B., 2012, p. 1376; N.J.W., 2012, p. 392, note P. Hannes; Comm. Liège, 29 juin 2010, D.A.O.R., 2011, p. 148. Contra, voy. Comm. Anvers, 30 novembre 2011, D.A.O.R., 2012, p. 101; Comm. Termonde, 24 mai 2012, R.D.C., 2013, p. 59.
[16] Voy. art. 24, § 1er, LCE.
[17] Voy. W. David, « La suspension des voies d'exécution durant la procédure de réorganisation judiciaire », in Actualité de la continuité, continuité de l'actualité, Bruxelles, Larcier, 2012, p. 292; S. Brijs, « De wet betreffende de continuïteit van ondernemingen », T.R.V., 2009, p. 691.
[18] Dans ce sens, Prés. Comm. Audenarde, 9 juillet 2013, T.G.R.-T.W.V.R., 2014, p. 37.
[19] Voy. Mons, 9 septembre 2013, 2012/R.G./103, inédit, qui a repris l'avis de S. Vanhaelst et M. Gossiaux dans « Les implications fiscales d'une réorganisation judiciaire au regard de la loi sur la continuité des entreprises », in Actualité de la continuité et continuité de l'actualité, Bruxelles, Larcier, 2012, n° 28. Voy. aussi dans ce sens, C. Verbruggen et S. Van Ommeslaghe, « Abus de droit et loi sur la continuité des entreprises », in Actualité de la continuité et continuité de l'actualité, p. 132, n° 29; Fr. Georges, obs. sous Mons, 26 février 2008, op. cit., J.L.M.B., 2008, p. 1282.
[20] Comm. Liège, 24 avril 2014, R.G. A/14/895, inédit; Liège (7e ch.), 13 mai 2014, 2014/RG/ 735, inédit; voy. sur ce point, C. Verbruggen et S. Van Ommeslaghe, « Abus de droit et loi sur la continuité des entreprises », o.c., p. 134, n° 39.
[21] Cass., 30 octobre 2014, F.J.F., 2015 (sommaire), liv. 3, p. 71; J.L.M.B., 2015, liv. 20, p. 927; R.D.C., 2015, p. 587, note M. Vanmeenen; dans ce sens, voy. égal. W. David, « La suspension des voies d'exécution durant la procédure de réorganisation judiciaire », o.c., p. 294, n° 5.
[22] J.-F. Van Drooghenbroeck, S. Jacmain et S. Brijs, « Un peu de droit judiciaire … », in Actualité de la continuité et continuité de l'actualité - Etats généraux de la continuité de l'entreprise, o.c., p. 226.
[23] Comm. Liège, 21 décembre 2010, Ius & Actores, 2011, liv. 2, p. 273.
[24] Voy. M. Grégoire, Publicité foncière, sûretés réelles et privilèges, Bruxelles, Bruylant, 2006, pp. 275 et s.
[25] W. David, « La suspension des voies d'exécution durant la procédure de réorganisation judiciaire », op. cit., pp. 290 et s. et références citées et plus particulièrement, p. 303, n° 19. Contra Comm. Anvers, 30 novembre 2011, D.A.O.R., 2012/101, p. 101.
[26] A. Zenner, « Les créances de l'administration fiscale en cas de réorganisation judiciaire » (obs. sous Liège, 24 janvier 2012), J.T., 2012, p. 521.
[27] C.C., 4 février 2010, n° 5/2010, N.J.W., 2010, liv. 223, p. 416, note J. Leaerts; R.A.B.G., 2010, liv. 8, p. 475; Rev. prat. soc., 2010 (sommaire), liv. 1-2, p. 104, note I. Verougstraete; R.W., 2009-2010 (sommaire), liv. 39, p. 1635, note E. Dirix; R.D.C., 2010, p. 286; T. Fam., 2010, liv. 5, 90, note C. Aerts.
[28] Comm. Anvers, 30 novembre 2011, D.A.O.R., 2012, p. 101, note A. Van Hoe. Contra, voy. Comm. Tournai, 28 novembre 2011, inédit, (R.G. A/11/00931 cité par W. David).
[29] Un tel raisonnement était déjà utilisé par le fisc pour prétendre à la qualité de créancier sursitaire extraordinaire même avant la prise d'inscription, au motif que sa créance devait déjà être considérée comme virtuellement hypothécaire. Une telle analyse est évidemment erronée puisque l'hypothèque ne produit son effet d'indisponibilité qu'une fois inscrite. Elle ne produit aucun effet avant son inscription.
[30] Liège, 24 janvier 2012, J.T., 2012, p. 521, note A. Zenner.
[31] M. Grégoire, Théorie générale du concours des créanciers en droit belge, Bruxelles, Bruylant, 1992, p. 27.
[32] A. Zenner, J.T., 2012, p. 520; W. David, J.P. Renard et V. Renard, La loi relative à la continuité des entreprises: mode d'emploi, Kluwer, 2009, p. 142; M. Grégoire, « Le sort des créanciers et leurs garanties », op. cit., p. 160.
[33] Si le plan de réorganisation, dûment homologué par le tribunal n'est pas respecté, sa révocation, sollicitée par un créancier ou par le ministère public, sur la base de l'art. 58 LCE, jusqu'à 5 ans après le sursis, n'emporte pas, de plein droit, la faillite du débiteur. Certes, l'art. 41 LCE permet à tout intéressé de demander au tribunal qu'il prononce, par le même jugement, la fin anticipée du sursis et la faillite du débiteur. Mais d'une part, la requête doit indiquer spécifiquement qu'elle tend à entendre prononcer la faillite et, d'autre part, il convient, pour que le tribunal y fasse droit, d'établir que, outre les conditions de révocation du sursis, celles de la faillite sont également réunies. Si d'autres hypothèses de concours pourraient encore être envisagées - telles que, par exemple, la saisie-exécution immobilière qui intervient à l'initiative d'un créancier non sursitaire -, en dresser la liste exhaustive dépasserait le cadre de la présente contribution.
[34] Doc. parl., Ch. Repr., 2008-2009, n° 160/005, p. 156.
[35] I. Verougstraete, op. cit., p. 159.
[36] Doc. parl., Chambre, S.E. 2007, n° 52-0160/002, pp. 44-45, cité par l'attendu B.6.1.
[37] Voy. à ce sujet, W. David, « Le paiement volontaire de créances sursitaires durant le sursis connaît-il certaines limites? », in Actualité de la continuité et continuité de l'actualité, o.c., pp. 311 et s.
[38] M. Gregoire, « Le point de vue des créanciers face à la réorganisation de l'entreprise de leur débiteur », in N. Thirion (dir.), Réorganisation judiciaire, faillite, liquidation déficitaire. Actualités et pratique, Liège, Anthemis, CUP, vol. 120, 2010, p. 220.
[39] M.-C. Ernotte, op. cit., J.L.M.B., 2016, p. 1066.
[40] Certaines sanctions peuvent toutefois s'attacher à un tel paiement volontaire. Voy. à ce sujet, W. David, « Le paiement volontaire de créances sursitaires durant le sursis connaît-il certaines limites? », in Actualité de la continuité et continuité de l'actualité, Bruxelles, Larcier, 2012, pp. 319 et s. Qui envisage différentes sanctions allant de la mise en cause de la responsabilité du débiteur et/ou de ses dirigeants, à l'action paulienne et son application particulière en matière de faillite (art. 20 de la loi sur les faillites) jusqu'aux sanctions pénales prévues aux art. 492bis du Code pénal et 73 de la LCE.
[41] Laquelle n'était pas en vigueur, il est vrai, au moment des faits qui ont conduit à poser la question préjudicielle examinée.
[42] Bruxelles, 16 décembre 2010, D.A.O.R., 2011, p. 436; Liège, 29 décembre 2010, J.L.M.B., 2011, p. 988; Comm. Courtrai, 31 janvier 2011, D.A.O.R., 2011, p. 446; Anvers, 30 juin 2011, R.W., 2011-2012, p. 573, note E. Dirix.
[43] C.C., 18 janvier 2012, n° 2012/008, J.T., 2012, p. 125, note M.-F. Rigaux; D.A.O.R., 2012, p. 352, note J. Brondel; R.D.C., 2012, p. 435, note I. Verougstraete et A. Van Hoe. Voy. égal. J. Herinckx, « Traitement différencié des créanciers - réflexions critiques de droit comparé », in La loi relative à la continuité des entreprises - Année 2013, Actes du colloque CRIDES du 26 avril 2013.
[44] Cass., 7 février 2013, R.D.C., 2013, p. 469. Dans le même sens, voy. Anvers, 28 juin 2012, R.D.C., 2012, p. 733, note A. Van Hoe; Comm. Anvers, 6 janvier 2012, N.J.W., 2012, p. 516, note S. De Raedts; Comm. Namur, 22 février 2012, R.D.C., 2012, p. 536; Comm. Anvers, 22 février 2012, R.W., 2012-2013, p. 711; Anvers, 24 février 2012, R.W., 2012-2013, p. 512; Comm. Tongres, 23 avril 2012, R.W., 2012-2013, p. 266; Comm. Bruges, 29 juin 2012, T.R.V., 2013, p. 138, note S. Pauwels.
[45] Doc. parl., Ch. Repr., 2012-2013, 2692/001, pp. 5 et 25.
[46] La LCE prévoit spécifiquement, il est vrai, certaines limites au droit des créanciers qui tiennent notamment à la suspension des voies d'exécution et par exemple à la limitation de la mise en oeuvre de l'exception de compensation, ou à la suspension du cours des intérêts. Mais elles n'ont nullement pour vocation d'assurer l'égalité des créanciers; il s'agit, au contraire, de permettre la continuité de l'entreprise, seul objectif de la loi.
[47] En ce qui concerne les impôts compris dans les rôles rendus exécutoires antérieurement au jugement déclaratif de la faillite. Il en va de même pour les cotisations sociales antérieures au jugement déclaratif de faillite suivant l'art. 41ter de la loi du 27 juin 1969.
[48] I. Verousgtraete, « Rechten en garanties van de schuldeisers - De lopende overeenkomsten », in Ph. Lambrecht et C. Gheur (dirs.), La loi relative à la continuité des entreprises, Louvain-la-Neuve, Anthemis, 2010, p. 144, cité par A. Zenner, J.-Ph. Lebeau et C. Alter, « La loi relative à la continuité des entreprises à l'épreuve de sa première pratique », Bruxelles, Larcier, 2010, Dossiers du J.T., vol. 76.