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Limites du pouvoir de dérogation en matière d'OPA obligatoire, R.D.C.-T.B.H., 2017/5, p. 512-515

DROIT FINANCIER
Offre d'acquisition - Modification du contrôle - Modification du contrôle d'une société ayant fait ou faisant publiquement appel à l'épargne - Offre publique d'acquisition obligatoire - Pouvoir de dérogation de la Commission bancaire et financière - Oui - Respect obligatoire des objectifs globaux de la loi - Non
Le pouvoir de la Commission bancaire et financière d'accorder des dérogations aux arrêtés royaux pris en exécution de l'article 15, § 1er et 2, de la loi du 2 mars 1989 relative à la publicité des participations importantes dans les sociétés cotées en bourse et réglementant les offres publiques d'acquisition comprend celui d'accorder des dérogations à l'obligation prescrite par l'article 41, § 1er, de l'arrêté royal du 8 novembre 1989 relatif aux offres publiques d'acquisition et aux modifications du contrôle des sociétés.
Il ne résulte pas de l'article 15, § 3, de la loi du 2 mars 1989 que l'exercice par la Commission bancaire et financière du pouvoir d'accorder des dérogations aux arrêtés royaux pris en exécution de l'article 15, § 1er et 2, de la loi doive respecter les trois objectifs globaux visés à l'article 15, § 1er, de cette loi.
FINANCIEEL RECHT
Overnamebod - Controlewijziging - Wijziging op de controle op vennootschappen die een publiek beroep op het spaarwezen doen of hebben gedaan - Verplichte openbare aanbieding - Bevoegdheid van de Commissie voor het bank- en financiewezen om afwijkingen toe te staan - Ja - Verplichte eerbiediging van de algemene doelstellingen van de wet - Nee
De bevoegdheid van de Commissie voor het bank en financiewezen om afwijkingen toe te staan op de koninklijke besluiten ter uitvoering van artikel 15, § 1 en 2 van de wet van 2 maart 1989 op de openbaarmaking van belangrijke deelnemingen in ter beurze genoteerde vennootschappen en tot reglementering van de openbare overnameaanbiedingen, behelst ook het toestaan van afwijkingen op de verplichting opgelegd bij artikel 41, § 1 van het koninklijk besluit van 8 november 1989 op de openbare overnameaanbiedingen en de wijzigingen op de controle op vennootschappen.
Uit artikel 15, § 3 van de wet van 2 maart 1989 volgt niet dat de Commissie voor het bank en financiewezen, in de uitoefening van haar bevoegdheid om afwijkingen toe te staan op de koninklijke besluiten ter uitvoering van artikel 15, § 1 en 2 van de wet, de drie algemene doelstellingen van artikel 15, § 1 van die wet dient te eerbiedigen.
Limites du pouvoir de dérogation en matière d'OPA obligatoire
Jean-Marc Gollier [1]
I. Introduction

1.L'article 15, § 3, de la loi du 2 mars 1989 relative à la publicité des participations importantes dans les sociétés cotées en bourse et réglementant les offres publiques d'acquisition énonçait que:

« La Commission bancaire est chargée de veiller à l'application des arrêtés pris en vertu des § 1er et 2. Elle peut demander que lui soient transmis les renseignements nécessaires à l'application desdits arrêtés. Elle peut accorder, dans des cas spéciaux, des dérogations motivées auxdits arrêtés. »

2.Le pouvoir de dérogation de la FSMA est aujourd'hui déterminé par l'article 35, § 2, alinéa 1er, de la loi du 1er avril 2007 relative aux offres publiques d'acquisition. Le pouvoir de dérogation s'étend actuellement non seulement aux dispositions des arrêtés d'exécution de la loi du 1er avril 2007 mais également aux dispositions de la loi elle-même.

3.L'arrêt commenté donne l'occasion d'aborder brièvement deux problématiques de l'OPA obligatoire: (II.A) l'existence d'un droit subjectif des actionnaires à la reprise de leurs titres et (II.B) les modalités d'exercice par la CBF (aujourd'hui FSMA) d'un pouvoir de dérogation au profit de celui qui serait tenu à une OPA obligatoire, pouvoir qui peut affecter, voire éteindre, un tel droit subjectif. Nous conclurons ensuite brièvement (IV).

II. Rappel des faits [2]

4.En 1990, le groupe Brugefi, actionnaire de contrôle de la société cotée de droit belge PCB, qui était dans une situation financière critique, a signé un protocole d'accord avec le groupe français OCP. Aux termes de cet accord, OCP souscrivait à une augmentation de capital de la société Brugefi Invest, dans laquelle était logée la participation dans PCB. Brugefi Invest souscrivait à son tour une augmentation de capital de PCB. A l'issue de cette opération, Brugefi et OCP détenaient chacune 50% de Brugefi Invest. Aucune décision relative à l'orientation de la gestion ne pouvait être prise sans qu'elle ne recueille l'accord des deux partenaires, de sorte qu'ils disposaient ensemble du contrôle conjoint de PCB.

5.En 1992, la Commission bancaire et financière (la « CBF ») a dû réexaminer cette opération sur base d'informations nouvelles, à un moment où PCB rencontrait à nouveau des difficultés financières et où seul le groupe OCP était en mesure de procéder à une nouvelle recapitalisation de celle-ci. La CBF a alors constaté que la modification du contrôle exercé sur PCB aurait dû entraîner une offre publique obligatoire au prix le plus élevé obtenu pour cette acquisition de contrôle [3].

Le groupe OCP avait alors sollicité de la CBF qu'elle fasse usage de son pouvoir de dérogation pour la dispenser de faire une OPA obligatoire [4].

La CBF avait accordé cette dérogation en la motivant sur les considérations suivantes: OCP était apparemment de bonne foi; en 1990 comme en 1992, PCB se trouvait dans une situation financière qui menaçait sa continuité et imposait une recapitalisation importante et rapide, que seul le groupe OCP était en mesure de faire. La CBF justifiait en outre sa décision par référence notamment aux réglementations françaises et britanniques qui permettaient de déroger à l'obligation de lancer une OPA lorsque l'acquisition d'actions se fait dans le cadre d'une opération de sauvetage de la société [5].

6.En octobre 1993, des actionnaires minoritaires de PCB ont introduit une action en justice notamment contre Brugefi Invest, Brugefi et OCP pour obtenir condamnation de ces dernières à acquérir leurs titres PCB au prix le plus élevé payé dans le cadre de la modification du contrôle opéré sur PCB. Le tribunal de commerce de Bruxelles a, par jugement du 10 juin 1996, décidé que la cession de contrôle avait fait naître un droit pour les actionnaires minoritaires de se voir offrir le rachat de leurs actions PCB au prix le plus élevé payé pour l'acquisition de ce contrôle et que la dérogation accordée par la CBF n'avait pas valablement éteint ce droit [6]. Le tribunal a jugé que les motifs de la dérogation accordée par la CBF étaient étrangers aux objectifs visés par l'article 15, § 1er, de la loi du 2 mars 1989: l'égalité de traitement des actionnaires, la protection des épargnants et la transparence du marché. Or, estimait le tribunal, la compétence de la CBF pour accorder une dérogation n'était valable que si elle était motivée par l'un de ces objectifs. Le tribunal en conclut que l'octroi d'une dérogation à l'OPA obligatoire en vue du sauvetage d'une société n'entrait pas dans les compétences de la CBF.

OCP a interjeté appel contre cette décision. Par un arrêt du 22 mai 2014, la cour d'appel de Bruxelles a réformé le jugement entrepris. Se fondant sur l'arrêt de la Cour de cassation du 10 mars 1994 (Wagons-Lits[7] et sur un de ses propres arrêts (IBT[8], la cour d'appel a jugé que la CBF disposait d'une compétence discrétionnaire d'accorder des dérogations à la législation en matière d'OPA. L'ordre judiciaire ne pouvant apprécier l'opportunité d'une telle dérogation, sous peine de méconnaître le principe de séparation des pouvoirs, la cour en a vérifié uniquement la légalité formelle. Constatant que la dérogation accordée était régulièrement motivée, qu'elle n'était pas arbitraire et qu'aucune forme substantielle n'avait été violée, la cour a déclaré l'action des actionnaires minoritaires, fondée sur l'article 41 de l'arrêté royal du 8 novembre 1989, non fondée.

Cette décision a fait l'objet d'un pourvoi en cassation, dont l'arrêt de rejet est repris ci-dessus.

III. Pouvoir de dérogation de la FSMA
A. L'existence de droits subjectifs à la reprise

7.Dans l'arrêt Wagons-Lits, la Cour de cassation avait jugé « que l'obligation qui pèse sur l'acquéreur en cas de cession de contrôle moyennant un prix supérieur à celui du marché crée corrélativement au profit des porteurs un droit subjectif à la reprise de leurs titres » et que « le pouvoir qui (…) est conféré [à la CBF] par l'article 15, § 3, de la loi, d'accorder, dans des cas spéciaux, des dérogations (…) n'a pas pour effet de modifier la nature du droit des porteurs à la reprise de leurs titres (…) ni de les priver du droit à une telle reprise lorsque la Commission bancaire et financière n'a pas accordé régulièrement une telle dérogation » [9].

Dans l'affaire des Wagons-Lits, la question qui se posait devant les juridictions de fond était de savoir si, en approuvant un prospectus d'offre volontaire à un prix inférieur à celui qui avait été obtenu par le groupe Frère lorsqu'il avait vendu sa participation à la Générale de Belgique, la CBF n'avait pas, implicitement mais certainement, dérogé à l'obligation de lancer une OPA au prix de la cession de contrôle, à supposer qu'il y ait eu cession de contrôle à l'occasion de cette vente.

Cette question devait recevoir une réponse négative. D'une part, le droit du porteur de titres naît indépendamment de la décision de la CBF [10]. D'autre part, pour que ce droit puisse être affecté par une décision de la CBF, il aurait fallu que la CBF ait pris une décision de dérogation en bonne et due forme, c'est-à-dire en identifiant l'objet de sa décision et en motivant sa décision de dérogation. Cette obligation de motivation avait été considérée comme essentielle dans la décision IBT  [11]. On se souvient qu'une décision d'approbation de prospectus (anciennement appelée « nihil obstat ») s'abstient de se prononcer sur le caractère juste du prix offert [12]. L'approbation porte uniquement sur la qualité apparente de l'information et le respect des modalités réglementaires de l'OPA. L'approbation du prospectus laisse intacts les droits subjectifs de l'actionnaire minoritaire.

8.Du fait que l'arrêt de la Cour de cassation précisait que l'existence d'un pouvoir de dérogation de la CBF n'affectait pas les droits des porteurs à une OPA obligatoire « lorsque la Commission bancaire et financière n'a pas accordé régulièrement une telle dérogation », il pouvait se déduire a contrario  [13] de cet arrêt que si une dérogation avait été régulièrement accordée, le droit subjectif du porteur aurait pu être affecté ou supprimé par cette dérogation en faveur de celui qui était tenu de réaliser l'OPA [14].

B. Le respect des objectifs énoncés par la loi

9.L'arrêt commenté confirme tout d'abord que le pouvoir de dérogation de la CBF « comprend celui d'accorder des dérogations à l'obligation prescrite par l'article 41, § 1er, de l'arrêté royal du 8 novembre 1989 » (réponse à la 3e branche du moyen).

10.L'arrêt commenté tranche ensuite la question de savoir si la dérogation accordée devait respecter les objectifs énoncés par l'article 15, § 1er, de la loi du 2 mars 1989: l'égalité de traitement des actionnaires, la protection des épargnants et la « transparence » du marché. C'est en effet la référence, dans les travaux préparatoires, aux objectifs de la loi qui avait conduit le tribunal de commerce de Bruxelles à trancher en faveur des actionnaires minoritaires de PCB. En degré d'appel, la cour avait jugé que si ces objectifs devaient « guider la CBF dans le cadre de l'exercice de son pouvoir de dérogation », il n'en restait pas moins que « la préservation de la continuité de l'entreprise participe à la sauvegarde des intérêts des porteurs de titres » [15].

Dans l'arrêt commenté, la Cour de cassation va plus loin: elle considère que l'article 15, § 3, de la loi du 2 mars 1989 ne limitait pas le pouvoir de dérogation de la CBF au respect des « trois objectifs globaux visés à l'article 15, § 1er, de cette loi » (réponse à la 4e branche du moyen). C'était également la position de la majorité de la doctrine [16].

11.L'actuel article 35, § 2, alinéa 1er, de la loi du 1er avril 2007 énonce que « la FSMA motive ses décisions de dérogation par référence expresse aux orientations définies à l'article 9 ». Au cours des travaux préparatoires, il a été indiqué que « ces règles [relatives au pouvoir de dérogation] rejoignent au demeurant les dispositions de l'article 15, § 3, de la loi du 2 mars 1989, à cette différence importante près que la CBFA doit motiver ses dérogations par référence expresse aux orientations définies à l'article 9 (…) ».

Dans ce cadre, la FSMA a l'obligation de justifier l'exercice de son pouvoir de dérogation au regard des objectifs visés audit article 9, à savoir l'égalité de traitement des actionnaires, le droit de ces derniers à disposer de suffisamment de temps et d'information pour prendre une décision sur l'offre, l'obligation pour l'organe de gestion d'agir dans l'intérêt de la société dans son ensemble, l'interdiction de manipuler les cours de bourse, l'obligation pour l'offrant de disposer de la contrepartie due et de ne pas gêner la société au-delà d'un délai raisonnable. La FSMA fait régulièrement état, dans ses rapports annuels, des dérogations accordées et des motifs de ces dérogations, liés à ces objectifs [17].

Une dérogation telle que celle qui fut accordée à OCP n'est plus envisageable sans un rattachement aux objectifs financiers du régime actuel [18].

IV. Conclusion

12.Avant la loi du 1er avril 2007, l'autorité de contrôle des marchés financiers pouvait utiliser son pouvoir de dérogation en fonction de l'ensemble des circonstances économiques et sociales, bref, en fonction de l'intérêt général, y compris la nécessité de sauver l'entreprise cotée objet du changement de contrôle.

Sous le régime de la loi du 1er avril 2007, seules des circonstances conformes aux objectifs financiers de la législation OPA sont de nature à permettre l'octroi de dérogations par la FSMA. Réapparaît en filigrane le business case for CSR  [19]: l'intérêt financier décidément dominant ne doit-il pas toujours garder en perspective l'intérêt général dont le souci reste, en fin de compte, favorable au développement durable des marchés financiers eux-mêmes?

Wall Street tend à nouveau à se détacher de Main Street pour vivre selon ses propres lois ignorantes de l'intérêt général, parce qu'elles seraient par hypothèse garantes de l'intérêt général (« Efficient market hypothesis » (EMH)). Nous savons qu'hélas, si l'hypothèse des marchés efficients est une hypothèse de travail très utile pour la théorie financière, elle ne se vérifie pas toujours dans la réalité et n'aboutit pas nécessairement à une solution adéquate pour la société. Limitons dès lors l'ampleur de ce détachement pour éviter de nouvelles déconvenues! La cour d'appel avait, de ce point de vue, légitimement jugé que la dérogation accordée en vue d'assurer la continuité de l'entreprise cotée « participait à la sauvegarde des intérêts des porteurs de titres », ce qui ne peut être vrai que dans une perspective à long terme.

[1] Avocat chez Eubelius, chargé de cours invité à l'UCL.
[2] Les faits sont relatés dans l'arrêt qui fait l'objet du pourvoi en cassation: Bruxelles, 22 mai 2014, R.D.C., 2015, 444-462.
[3] Art. 41 de l'arrêté royal du 8 novembre 1989 relatif aux offres publiques d'acquisitions et aux modifications du contrôle des sociétés.
[4] Art. 15, § 3, de la loi du 2 mars 1989 relative à la publicité des participations importantes dans les sociétés cotées en bourse et réglementant les offres publiques d'acquisition.
[5] CBF, Rapport annuel 1991-1992, 82-84. Il est remarquable de noter que la description donnée par la CBF dans son rapport annuel de la dérogation accordée est anonymisée. L'octroi de la dérogation n'avait par ailleurs fait l'objet d'aucune publicité.
[6] CBF, Rapport annuel 1995-1996, 106 et s.
[7] Cass., 10 mars 1994, Arr. Cass., 1994, 236; J.T., 1994, 419; T.R.V., 1995, 183, note H. Laga; R.D.C., 1995, 15, note Fr. Glansdorff; Rev. Banq., 1994, 255, note A. Bruyneel.
[8] Bruxelles, 19 janvier 2010, R.D.C., 2010/10, 982, note J.-M. Gollier.
[9] Cass., 10 mars 1994, Arr. Cass., 1994, p. 236. Il est intéressant d'ajouter que la Cour justifiait par ailleurs le caractère d'ordre public de l'article 41 précité par la nécessité de « maintenir la confiance des actionnaires »:

« Attendu que l'article 41, alinéa 1er, de l'arrêté royal du 8 novembre 1989 traduit la volonté du législateur, exprimée par l'article 15 de la loi du 2 mars 1989, d'assurer l'information et l'égalité de traitement des porteurs de titres, de sauvegarder leurs intérêts et de favoriser le bon fonctionnement du marché; qu'il ressort des travaux préparatoires de cette loi que l'égalité des actionnaires est étroitement liée à une organisation des marchés financiers qui soit apte à maintenir la confiance des épargnants;

Attendu que l'arrêt considère que les dispositions précitées constituent une réglementation de police de l'économie en matière d'offre publique d'acquisition et de modification de contrôle des sociétés ayant fait ou faisant publiquement appel à l'épargne (...) prise afin d'assurer le bon fonctionnement du marché - et, partant, de l'économie du pays - ce qui implique que les porteurs de titres bénéficient tant des règles de la transparence et d'information que du respect du principe d'égalité entre les actionnaires;

Attendu que, sur la base de ces considérations, l'arrêt décide légalement que l'article 41, alinéa 1er, de l'arrêté royal du 8 novembre 1989 est d'ordre public. »

En justifiant le caractère d'ordre public de cette disposition par la volonté d'assurer une « organisation des marchés financiers qui soit apte à maintenir la confiance des épargnants », la Cour mettait l'accent sur l'importance d'un traitement égal du public par rapport aux actionnaires de contrôle.
[10] Voy. note J.-M. Gollier sous Bruxelles, 19 janvier 2010, R.D.C., 2010/10, pp. 1011-1012.
[11] Bruxelles, 19 janvier 2010, R.D.C., 2010/10, p. 982, note J.-M. Gollier.
[12] J.-M. Gollier, « L'OPA volontaire de l'actionnaire majoritaire - commentaires des affaires Tractebel et Cobepa », Rev. prat. soc., 2001, 57-59. Comp. à propos du contrôle du prix d'un « squeeze-out », obs. J.-M. Gollier sous Cass., 27 juin 2011, Rev. prat. soc., 2011, 178, spéc. 184-186.
[13] Mais nous connaissons la faiblesse de l'argument a contrario qui n'est décisif que s'il aboutit à la confirmation d'une règle plus générale (J. Van Ryn et J. Heenen, Principes de droit commercial, III, Bruxelles, Bruylant, 1981, n° 426 ; Ch. Perelman, Logique juridique - Nouvelle rhétorique, Paris, Dalloz, 1979, 55-56).
[14] Voy. not. X. Dieux, « Examen de jurisprudence. Droit financier (1999-2003) », R.C.J.B., 2005, p. 399. Contra, G. Jakhian, Les offres publiques d'acquisition Chronique de jurisprudence 1989-2000, coll. Les dossiers du Journal des tribunaux, n° 26, Bruxelles, Larcier, 2001, 180; H. Laga, « Het cassatiearrest van 10 maart 1994 inzake Wagons-Lits en het verplicht openbaar bod », T.R.V., 1995, p. 189; J.-M. Nelissen-Grade, « Het openbaar bod: zes jaar ervaring », in K. Byttebier et R. Feltkamp (eds.), De regulering van het beursapparaat, Bruges, die Keure, 1997, 74.
[15] Bruxelles, 22 mai 2014, R.D.C., 2015, 460. Cette appréciation de la cour d'appel suppose un parti pris pour le long terme: à court terme, si les actionnaires minoritaires s'étaient vu offrir par OCP de céder leurs titres au prix le plus élevé payé à l'occasion de la cession de contrôle de PCB, ils auraient pu liquider leur investissement à un prix qui leur était très avantageux. Peu leur importait, dans une perspective à court terme, qu'OCP éprouve des difficultés pour assurer un financement adéquat de sa nouvelle participation de contrôle. Le parti pris pour l'intérêt à long terme est également celui qui, d'après la jurisprudence récente de la Cour de cassation en matière d'intérêt social, doit être privilégié (Cass., 28 novembre 2013, Rev. prat. soc., 2014, 41, spéc. 59-60).
[16] X. Dieux, o.c., p. 400. Contra, G. Jakhian, o.c., p. 180.
[17] Voy. not. FSMA, Rapport annuel 2015, 99-105.
[18] On notera la décision remarquable de la FSMA d'accorder une dérogation à la règle de l'OPA obligatoire (art. 50 de l'arrêté royal du 27 avril 2007 relatif aux offres publiques d'acquisition, ci-après l'« A.R. OPA ») pour une erreur de calcul du groupe Bois Sauvage qui avait, techniquement, franchi le seuil de 30% à l'occasion d'une acquisition de titres Recticel et n'avait pas refranchi le seuil à la baisse dans le délai réglementaire (art. 52, § 1er, 7°, A.R. OPA). Après avoir constaté que ce franchissement était sans conséquence sur l'exercice par Bois Sauvage de ses pouvoirs d'actionnaire dans Recticel et à condition que Bois Sauvage redescende en-dessous du seuil de 30% dans un délai de 40 jours à dater de la décision de la FSMA, la FSMA a accordé une dérogation à l'OPA obligatoire en la motivant en ces termes: « En conséquence, accorder une dérogation à l'obligation de lancer une offre dans le cas d'espèce n'était pas de nature à porter atteinte à l'égalité de traitement des détenteurs de titres Recticel (art. 9, 1°, de la loi OPA) ou à l'intérêt social de Recticel (art. 9, 3°, de la loi OPA). La dérogation n'affectait par ailleurs pas les autres orientations prévues par l'article 9 de la loi OPA. » (Rapport FSMA 2014, p. 96). La justification à la dérogation est une justification négative par référence aux objectifs visés par l'article 9 de la loi OPA: aucun des droits financiers garantis par la loi OPA n'était affecté par cette décision, d'après l'appréciation de la FSMA. Une telle approche, conforme au texte de la loi, est fréquente et donne en pratique à la FSMA un pouvoir de dérogation qui reste très étendu. La décision de la FSMA part du principe qu'à long terme, les porteurs de titres devraient trouver un intérêt financier plus important à rester actionnaires de Recticel qu'à céder leurs titres à Bois Sauvage.
[19] R. Aydogdu, « La Corporate Social Responsibility, le droit par-delà le marché et l'Etat (partie 1) », R.P.S.-T.R.V., 2016, 692; id., « La Corporate Social Responsibility, le droit par-delà le marché et l'Etat (partie 2) », R.P.S./T.R.V., 2016, 870-875 et réf. cit.