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Actualité : Cour de justice de l'Union européenne, 14/06/2017, C-610/15, R.D.C.-T.B.H., 2017/7, p. 765-766

Cour de justice de l'Union européenne 14 juin 2017

Affaire: C-610/15
DROIT D'AUTEUR ET DROITS VOISINS
Dispositions communes - Généralités - Communication au public - Notion de « public nouveau » - Gestion d'une plate-forme de partage en ligne


AUTEURSRECHT EN NABURIGE RECHTEN
Gemeenschappelijke bepalingen - Algemeen - Mededeling aan het publiek - Begrip van “nieuw publiek” - Beheer van een onlineplatform voor de uitwisseling van bestanden


A l'origine du litige se trouvent, d'une part, Stichting Brein, fondation néerlandaise ayant pour objet de défendre les intérêts des titulaires de droits d'auteur et, d'autre part, Ziggo et XS4ALL, fournisseurs d'accès à Internet, dont une importante partie de leurs abonnés sont également utilisateurs de la plate-forme de partage de fichiers en ligne dénommée « The Pirate Bay ». Cette plate-forme permet à ses utilisateurs de partager et de télécharger par fragments (« torrents ») des oeuvres se trouvant sur leurs propres ordinateurs, pour la plupart protégées par les droits d'auteur.

Saisie à titre préjudiciel par le Hoge Raad der Nederlanden, la Cour se prononce sur la question de savoir si une plate-forme telle que « The Pirate Bay » effectue une « communication au public » au sens de l'article 3, 1., de la directive n° 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information.

La Cour distingue les éléments cumulatifs « d'acte de communication » d'une oeuvre et de la communication de celle-ci à un « public ». Concernant le premier élément, elle rappelle l'importance du caractère délibéré de l'acte de communication et insiste sur le fait qu'en l'absence de l'intervention de l'utilisateur, celui-ci ne pourrait pas, ou difficilement, avoir accès à l'oeuvre communiquée. Bien qu'elle admette que les fichiers sont concrètement mis en ligne par les utilisateurs de la plate-forme, la Cour considère toutefois que les administrateurs de la plate-forme jouent un rôle essentiel dans la communication des oeuvres protégées, en ce qu'ils mettent à disposition, gèrent, indexent, répertorient, suppriment et filtrent de manière active les fichiers faisant l'objet de la violation des droits d'auteur.

Concernant le deuxième élément, la Cour rappelle que la notion de « public » comporte un seuil « de minimis », qui a pour conséquence que seul une communauté suffisamment large peut être prise en compte pour rentrer dans la notion de « public ». Ceci exclut de cette notion une communauté de personnes concernées trop petite, voire insignifiante. Dans cette affaire, plusieurs dizaines de millions d'utilisateurs (« peers ») ont accès à la plate-forme; considérés comme faisant partie d'un « public nouveau », en ce qu'ils n'ont pas été pris en compte par les titulaires du droit d'auteur lorsque ces derniers ont autorisé la communication initiale. Enfin, la Cour ajoute que le caractère lucratif de la communication peut être pertinent dans l'appréciation de la question.

La Cour en conclut que la mise à disposition et la gestion d'une plate-forme de partage en ligne qui, dans des circonstances telles que celles en cause, par l'indexation de métadonnées relatives à des oeuvres protégées et la fourniture d'un moteur de recherche permet aux utilisateurs de cette plate-forme de localiser ces oeuvres et de les partager dans le cadre d'un réseau de pair à pair (peer-to-peer), doit être considérée comme un acte de communication au public, au sens de la directive n° 2001/29/CE.