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L'arrêt KA Finanz AG : la fusion transfrontalière et la protection des créanciers, R.D.C.-T.B.H., 2018/1, p. 64-70

DROIT INTERNATIONAL PRIVÉ
Droit des conflits - Fusion transfrontalière - Droit applicable - Exception de lex societatis - Fusion transfrontalière - Directive n° 78/855/CEE - Directive n° 2005/56/CE - Fusion par absorption - Continuité de la loi applicable au contrat - Loi applicable à la protection des créanciers - Transfert de l'ensemble du patrimoine actif et passif de la société absorbée à la société absorbante
1. L'article 1er, 2., sous e), de la Convention de Rome, qui exclut du champ d'application de cette dernière les questions relevant du droit des sociétés, vise à ce titre également la fusion.
2. Une fusion par absorption implique que la société absorbante acquière la société absorbée dans son intégralité, sans extinction des obligations, et entraîne, sans novation, la substitution de la société absorbante à la société absorbée comme partie à l'ensemble des contrats conclus par cette dernière. Dès lors, la loi qui était applicable à ces contrats avant la fusion demeure celle applicable après cette fusion.
3. Les dispositions régissant la protection des créanciers de la société absorbée sont celles de la législation nationale dont relève cette société.
4. Les titres visés à l'article 15 de la directive n° 78/855 sont ceux qui confèrent à leurs porteurs des droits plus étendus qu'un simple remboursement des créances et des intérêts convenus. Il en va ainsi, en particulier, des titres qui reconnaissent à leurs porteurs le droit de les échanger contre des actions ou le droit de participer aux bénéfices de la société émettrice.
5. L'article 15 de la troisième directive n° 78/855/CEE doit être interprété en ce sens que cette disposition confère des droits aux porteurs de titres, autres que des actions, auxquels sont attachés des droits spéciaux, mais non à l'émettrice de tels titres.
INTERNATIONAAL PRIVAATRECHT
Conflictenrecht - Algemeen Verdrag van Rome - Toepasselijk recht - Uitzondering van lex societatis - Grensoverschrijdende fusie - Richtlijn nr. 78/855/EEG - Richtlijn nr. 2005/56/EG - Fusie door overneming - Continuïteit van het op de overeenkomst toepasselijk recht - Recht van toepassing op de bescherming van de schuldeisers - Overgang van alle activa en passiva van de overgenomen vennootschap op de overnemende vennootschap
1. Artikel 1, 2., onder e) van het Verdrag van Rome, dat bepaalt dat de bepalingen van dit verdrag niet van toepassing zijn op kwesties behorende tot het recht inzake vennootschappen, heeft zodanig eveneens betrekking op de fusie.
2. Een fusie door overneming heeft tot gevolg dat de overnemende vennootschap de overgenomen vennootschap in haar geheel verwerft, zonder dat de verbintenissen tenietgaan en leidt ertoe dat de overnemende vennootschap, zonder dat er sprake is van schuldvernieuwing, in de plaats treedt van de overgenomen vennootschap als partij bij alle overeenkomsten die deze laatste heeft gesloten. Het recht dat op deze overeenkomsten van toepassing was vóór de fusie, blijft derhalve ook ná deze fusie toepasselijk.
3. De bepalingen inzake de bescherming van de schuldeisers van de overgenomen vennootschap zijn die van het nationaal recht dat op die vennootschap van toepassing is.
4. De effecten bedoeld in artikel 15 van richtlijn nr. 78/855 zijn deze die aan de houders ervan ruimere rechten verlenen dan enkel en alleen het recht op voldoening van de schuldvorderingen en de overeengekomen rente. Dit is in het bijzonder het geval voor effecten die aan de houders ervan het recht toekennen om deze in te wisselen tegen aandelen of die de houders ervan recht geven op deelneming in de winst van de emittent.
5. Artikel 15 van de derde richtlijn nr. 78/855/EEG moet worden uitgelegd in die zin dat deze bepaling geen rechten verleent aan de emittent van effecten, andere dan aandelen, waaraan bijzondere rechten verbonden zijn, maar wel aan de houders ervan.
L'arrêt KA Finanz AG: la fusion transfrontalière et la protection des créanciers
Thierry Tilquin [1]
I. Introduction

1.Données de fait

Les données de fait qui sous-tendent la décision de la Cour de justice sont assez simples [2].

La société anonyme de droit autrichien Kommunalkredit Austria AG (« Kommunalkredit Austria ») a, comme nombre d'établissements de crédit, connu de sérieuses difficultés pendant la crise financière de 2008. Kommunalkredit Austria fut nationalisée le 3 novembre 2008 [3]. L'Etat autrichien soumit à la Commission européenne un plan de réorganisation de cet établissement de crédit [4].

Dans le cadre de cette réorganisation, les actifs de Kommunalkredit Austria furent distribués entre deux entités au terme d'une scission: les actifs les plus viables furent logés dans une autre entité, dont la viabilité et la continuité devaient ainsi être assurées (la « nouvelle » Kommunalkredit Austria AG) tandis que les autres actifs furent conservés par l'entité existante, qui devint ce que l'on qualifie communément de « bad bank » et fut renommée KA Finanz AG (« KA Finanz ») [5].

KA Finanz contrôlait la société de droit chypriote Kommunalkredit International Bank Ltd (« Kommunalkredit »), également établissement de crédit.

Kommunalkredit avait émis des Notes (les « Notes ») présentant des caractéristiques qui leur permettaient d'être pris en compte comme fonds propres réglementaires (en l'espèce « Tier 2 ») pour le calcul des ratios de solvabilité tels qu'ils étaient déterminés à l'époque sous le régime dit de Bâle II (infra, n° 4). En particulier, les Notes ne pouvaient donner lieu au paiement d'intérêts ou être remboursés que si ces paiements ou remboursements n'amenaient pas les fonds propres en dessous de « seuils fixés dans les lignes directrices applicables de la banque centrale de Chypre sur le calcul des fonds propres des banques » [6].

Ces Notes étaient régis par le droit allemand en ce qui concerne « la forme et le contenu des titres ainsi que tous les droits et les obligations des porteurs et de l'émettrice » [7].

2.L'opération litigieuse

Le 18 septembre 2010, KA Finanz absorba Kommunalkredit, au terme d'une opération régie par les dispositions nationales de droit autrichien et de droit chypriote issues de la directive n° 2005/56/CE sur les fusions transfrontalières (la « directive n° 2005/56/CE ») [8].

L'article 226 de la loi autrichienne sur les sociétés par actions [9], qui transposait les articles 13 à 15 de la troisième directive sur les fusions (la « troisième directive sur les fusions ») [10], vise notamment le sort des « titres participatifs » en cas de fusion et permet de les supprimer dans certains cas [11].

Dans le cadre de cette fusion, KA Finanz et Kommunalkredit avaient considéré (i) que les Notes émis par Kommunalkredit, société absorbée, étaient des « titres participatifs » au sens de cet article, (ii) que, tel que le confirmait une « fairness opinion », ces titres avaient perdu toute valeur [12], (iii) que les titulaires de ces titres n'avaient donc pas le droit de se voir remettre de nouveaux titres à émettre par la société absorbante KA Finanz dans le cadre de la fusion [13] et (iv) qu'il était « mis fin auxdits (titres) à la date de la prise d'effet de la fusion transfrontalière et (n'était) accordée aucune indemnité en contrepartie » [14].

3.L'affaire portée devant la Cour de justice

Certains titulaires de ces Notes, dont en l'espèce la société de droit autrichien Sparkassen Versicherung AG Vienna Insurance Group (« Sparkassen »), ont porté l'affaire devant les cours et tribunaux autrichiens en requérant de la société absorbante le paiement des intérêts prévus par les Notes et, à titre subsidiaire, que KA Finanz lui octroie des droits équivalents, au sens de l'article 226, § 3, de l'AktG, et réponde de l'intégralité du préjudice résultant du refus de lui reconnaître ces droits.

KA Finanz a demandé qu'il soit préalablement constaté que les Notes avaient pris fin et qu'en tout cas, ces titres ne lui avaient pas été transmis.

Le tribunal de commerce de Vienne (« Handelsgericht Wien ») et le tribunal régional supérieur de Vienne (« Oberlandesgericht Wien ») ont considéré que les titres concernés étaient en réalité des titres de créance (infra, n° 4) et auraient donc précisément dû être transférés de plein droit, par l'effet de la fusion, à KA Finanz, qui en devenait ainsi débitrice (infra, nos 9 et s.).

KA Finanz a introduit un recours devant la Cour Suprême autrichienne (« Oberster Gerichtshof »), qui a toutefois souhaité s'assurer, notamment, que le contrat de base restait soumis à la loi qui le régissait (en l'espèce, la loi allemande) malgré la fusion et que la protection des créanciers en cas de fusion tombait bien dans l'exception de lex societatis visée à l'article 1, 2., e), de la Convention de Rome [15] (infra, n° 7) et quelle était la loi applicable (infra, n° 10).

4.Fonds propres réglementaires (observation)

Les parties à la procédure au fond ont été amenées à discuter de la nature des Notes émis par Kommunalkredit, cette question étant essentielle pour analyser le régime de protection dont bénéficiaient les titulaires de ces Notes.

On sait en effet que le modèle économique particulier des établissements de crédit et leur rôle essentiel pour l'économie a mené à ce qu'au fil du temps la structure de leur bilan soit réglementée afin de tenter de prévenir les difficultés de solvabilité ou de liquidité qu'ils pourraient connaître.

Les établissements de crédit ont ainsi des fonds propres au sens comptable (capital, primes d'émission, réserves, ...), mais inscrivent aussi à leur passif des instruments de fonds propres réglementaires qui, selon leurs caractéristiques, sont classés en fonds propres additionnels de catégories 1 (« additional tier 1 ») ou fonds propres de catégorie 2 (« tier 2 ») [16].

Les caractéristiques de ces instruments (selon les cas: subordination, pas d'obligation de paiement des intérêts, mécanisme d'absorption des pertes (« loss absorption »), absence d'obligation de remboursement, …) ont sans doute pu faire hésiter sur leur qualification.

KA Finanz soutenait ainsi en l'espèce qu'il fallait considérer les Notes comme des fonds propres - au sens comptable - au motif que le paiement des intérêts et du capital dépendait de la dotation en fonds propres de Kommunalkredit [17]. Le tribunal de commerce de Vienne a néanmoins considéré que « les obligations en cause n'étaient ni des titres participatifs ni d'autres titres assimilables à des actions, étant donné qu'elles n'avaient pas le caractère de capitaux propres et ne dépendaient pas non plus des bénéfices de la société ».

Le tribunal régional supérieur de Vienne a suivi cette analyse et estimé que l'article 226, § 3 de l'AktG, n'était pas applicable aux Notes [18].

La Cour de justice souligne en ce même sens qu'« il ressort des conditions d'émission, telles qu'elles sont présentées par la juridiction de renvoi, que les titres en cause au principal ne paraissent pas conférer à leurs porteurs des droits plus étendus qu'un simple remboursement des créances et des intérêts convenus. Il semblerait donc que ces titres ne relèvent pas du champ d'application de l'article 15 de la directive n° 78/855, ce qu'il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier ».

II. Enseignements de l'arrêt

5.Observation préalable: dispositions interprétées par la Cour de justice

La Cour de justice se prononce:

    • sur l'interprétation de la Convention de Rome et non sur le Règlement Rome I sur la loi applicable aux obligations contractuelles [19] entré en vigueur postérieurement à l'émission des Notes; et
    • sur l'interprétation de la troisième directive sur les fusions et non sur la directive n° 2011/35/UE, qui a codifié les principes applicables à la fusion (la « directive n° 2011/35/UE) » [20] postérieurement à la fusion litigieuse.

    Les solutions apportées sont toutefois transposables à ces nouveaux textes:

      • le Règlement Rome I comporte un texte presque similaire à celui de la Convention de Rome en ce qui concerne l'exception de lex societatis (infra, n° 7);
      • le texte codifié des articles 13 à 15 de la directive 2011/35/UE est identique à celui des articles 13 à 15 de la troisième directive sur les fusions [21].

      Depuis lors, tant la directive n° 2011/35/UE sur les fusions de sociétés anonymes que la directive n° 2005/56/CE sur les fusions transfrontalières ont été abrogées et leurs dispositions reprises dans la directive n° 2017/1132 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017 relative à certains aspects du droit des sociétés (la « directive n° 2017/1132/UE ») [22].

      Cette directive a pour but de codifier différentes directives en matière de droit des sociétés et est entrée en vigueur le 20 juillet 2017 (art. 167).

      On renverra donc ci-après aux dispositions visées par l'arrêt commenté en précisant le cas échéant les dispositions désormais applicables aux termes de la directive n° 2017/1132/UE.

      Enfin, des discussions sont en cours sur une adaptation de la réglementation des fusions transfrontalières et surtout sur la réglementation des scissions transfrontalières [23], mais qui ne devraient pas affecter les principes énoncés ci-après, si ce n'est qu'elles pourraient mener à une réglementation plus uniforme de la protection des créanciers.

      L'arrêt comporte de nombreux enseignements, sur l'exception de lex societatis dans la Convention de Rome (et donc dans le règlement sur la loi applicable aux obligations contractuelles) (infra, n° 7), sur le maintien de la loi applicable à un contrat en cas de fusion (infra, n° 8), sur l'application distributive des dispositions protégeant les créanciers (infra, nos 9 et 10) et sur la nature des « titres autres que des actions » (infra, n° 11), ainsi que sur le point, particulier au droit autrichien, de la suppression du droit des créanciers (infra, n° 12).

      6.Observation préalable: principes de droit international privé applicables aux fusions

      On considérait classiquement que dès lors que (i) les ordres juridiques respectifs reconnaissent l'existence des sociétés impliquées dans la fusion et que chacune des lex societatis en présence accepte le principe de la fusion, la fusion transfrontalière est en principe techniquement réalisable en appliquant les lois nationales concernées régissant la fusion, de manière « distributive » ou, parfois, cumulative et en appliquant, le cas échéant, une méthode dite « d'adaptation » [24]:

        • chaque société demeure en principe soumise aux dispositions et formalités de sa propre lex societatis qui seraient applicables à une fusion interne [25];
        • les aspects de la fusion transfrontalière qui interagissent avec la ou les autres sociétés impliquées dans la fusion, et qui requièrent par conséquent un traitement unitaire, se verront appliquer cumulativement les dispositions des lois nationales en présence [26];
        • il peut arriver que les prescriptions des lois en présence soient incompatibles, ou qu'il ne soit pas possible en pratique de respecter la lex societatis de l'autre société. En ce cas, il faut recourir à la méthode de l'adaptation, qui permet, lorsque l'ordre juridique du for ne connaît pas de règle similaire à celle de la loi étrangère, d'adapter la loi étrangère soit par transposition de la règle étrangère dans une règle ou institution du for, soit en substituant à la règle étrangère une règle ou institution du for qui a les mêmes fonctions, soit par toute autre méthode d'harmonisation ou de rapprochement de deux ordres juridiques.

        Cette méthode sous-tend l'article 113 du Code de droit international privé qui dispose que « la fusion de personnes morales est régie, pour chacune de celles-ci, par le droit de l'Etat dont elle relève avant la fusion » [27] et surtout les principes énoncés par la directive n° 2005/56/CE sur les fusions transfrontalières (infra, n° 9) [28], sachant que ladite directive a pu s'appuyer sur une large uniformisation des dispositions en matière de fusion du fait de la transposition de la troisième directive sur les fusions et a tranché certaines questions qui requéraient une uniformisation: les effets de la fusion, l'absence de faculté de demander la nullité des fusions qui ont pris effet et le contrôle de légalité [29].

        A. Droit des sociétés et loi du contrat

        7.Exception de lex societatis visée par la Convention de Rome

        L'article 1, 2., e), de la Convention de Rome dispose que ses dispositions « ne s'appliquent pas (…) aux questions relevant du droit des sociétés, associations et personnes morales, telles que la constitution, la capacité juridique, le fonctionnement interne et la dissolution des sociétés, associations et personnes morales, ainsi que la responsabilité personnelle légale des associés et des organes pour les dettes de la société, association ou personne morale » [30].

        La Cour de justice précise en conséquence que la Convention de Rome « ne s'applique pas à la fusion de sociétés »: « les actes réglant la dissolution des sociétés, tels que la fusion ou le groupement des sociétés, figurent au nombre de ceux visés par l'exclusion prévue à l'article 1er, 2., de cette convention » [31].

        Même si le texte ne vise pas expressément la fusion, la scission et les opérations assimilées, cette solution ne faisait guère de doute.

        La délimitation entre le champ d'application de la lex contractus et de la lex societatis méritait toutefois d'être précisée, la Cour de justice ajoutant en particulier que les dispositions régissant la protection des créanciers relèvent aussi de la lex societatis (infra, nos 9 et 10) [32].

        8.Continuité de la lex contractus

        La Cour de justice se prononce en outre sur l'effet de la fusion sur la lex contractus régissant un contrat qui aurait été transféré dans le cadre d'une fusion.

        La fusion transfrontalière entraîne, de plein droit, par l'effet de la loi, la transmission universelle du patrimoine actif et passif de la société absorbée (art. 14, 1., de la directive n° 2005/56/CE) [33] et l'ensemble du rapport contractuel est donc transféré [34]: « la société absorbante acquière la société absorbée dans son intégralité, sans extinction des obligations qu'une liquidation aurait provoquée, et entraîne, sans novation, la substitution de la société absorbante à la société absorbée comme partie à l'ensemble des contrats conclus par cette dernière » [35].

        La loi applicable au contrat ressort de ce rapport contractuel et fait partie intégrante du transfert.

        En conséquence, la Cour de justice décide fort naturellement que « la loi applicable, à la suite d'une fusion par absorption transfrontalière, à l'interprétation, à l'exécution des obligations ainsi qu'aux modes d'extinction d'un contrat d'emprunt, tel que les contrats d'emprunt en cause au principal, conclu par la société absorbée, est celle qui était applicable à ce contrat avant cette fusion » [36].

        La loi allemande régissait donc en l'espèce les Notes dans le domaine de la loi du contrat avant et après la fusion.

        B. Protection des créanciers

        9.Types de droits et de protections visés

        La directive sur les fusions transfrontalières renvoie aux droits nationaux des sociétés concernées pour les dispositions et formalités de la fusion [37], à savoir celles qui « concernent en particulier le processus décisionnel relatif à la fusion », mais aussi (i) « la protection des créanciers des sociétés qui fusionnent », (ii) la protection des titulaires d'obligations, et (iii) celles des « porteurs de titres ou de parts (...) » (directive n° 2005/56/CE, art. 4, 2. [38]).

        Les articles 13 à 15 de la troisième directive sur les fusions nationales prévoient essentiellement deux types de protection non exclusive, selon que l'on a affaire à un titre de créance ou à un titre « participatif ».

        La différence de régime entre les créances et les « titres autres que des actions » s'explique par la nature de la protection nécessaire.

        Les dettes des sociétés concernées soit restent celles de l'absorbante, soit, en ce qui concerne les dettes de l'absorbée, sont transférées de plein droit à l'absorbante par l'effet de la fusion. Il n'y a donc pas lieu de leur substituer un autre titre de créance, et la protection des créances se conçoit donc plutôt en termes de qualité du débiteur - risque de voir la solvabilité du débiteur affectée au terme de la restructuration (infra, n° 10). Ceci n'empêche pas que certaines difficultés d'interprétation puissent surgir si certaines caractéristiques de la créance sont liées aux spécificités de la société absorbante ou absorbée qui seraient modifiées du fait de la fusion.

        Les titres autres que des actions représentatives du capital peuvent comporter une composante de dette, comme dans le cas des obligations convertibles. Les dispositions organisant l'équité des rapports d'échange sont toutefois d'application délicate et la troisième directive sur les fusions impose donc expressément de leur accorder des « droits au moins équivalents » et de s'en expliquer (infra, n° 11). Des difficultés d'interprétation peuvent surgir ici aussi.

        10.Titres de créance

        Les législations des Etats membres doivent prévoir « un système de protection adéquat des intérêts des créanciers des sociétés qui fusionnent pour les créances nées antérieurement à la publication du projet de fusion et non encore échues au moment de cette publication » (troisième directive sur les fusions, art. 13, 1. [39]), sachant qu'elles « prévoient, au moins, que ces créanciers ont le droit d'obtenir des garanties adéquates lorsque la situation financière des sociétés qui fusionnent rend cette protection nécessaire et que ces créanciers ne disposent pas déjà de telles garanties » et « [l]a protection peut être différente pour les créanciers de la société absorbante et ceux de la société absorbée » (troisième directive sur les fusions, art. 13, 2. et 3.) [40].

        Le droit belge a ainsi retenu un système fondé sur la possibilité pour les créanciers de demander une sûreté [41], calqué sur celui prévu en cas de réduction de capital par remboursement ou dispense totale ou partielle de libération [42].

        Un régime spécifique est en outre prévu pour les obligations émises par les sociétés concernées, mais qui n'est qu'une modalisation du régime des créances pour avoir égard au rôle de l'assemblée des obligataires [43].

        Les parties peuvent aussi prévoir certaines règles qui s'appliqueraient en cas de fusion (remboursement anticipé, application en l'état du mécanisme d'absorption des pertes, ...) [44]. Les conditions d'émission excluaient toutefois en l'espèce expressément la fusion comme cause de résolution anticipée [45].

        L'article 4, 2., de la directive n° 2005/56/CE [46] consacre pour le surplus la règle de l'application distributive des dispositions protectrices des créanciers: toute société impliquée dans une fusion transfrontalière doit respecter les dispositions protectrices des créanciers imposées par la législation nationale dont elle ressort [47].

        La Cour de justice souligne à cet égard que « les dispositions régissant la protection des créanciers de la société absorbée, dans un cas tel que celui en cause au principal, sont celles de la législation nationale dont relevait cette société » [48], donc en l'espèce, la loi chypriote.

        11.Titres autres que des actions

        L'article 15 de la directive n° 2011/35/UE [49], antérieurement article 15 de la troisième directive sur les fusions, vise « les porteurs de titres, autres que des actions, auxquels sont attachés des droits spéciaux » et précise qu'ils « doivent jouir, au sein de la société absorbante, de droits au moins équivalents à ceux dont ils jouissaient dans la société absorbée, sauf si la modification de ces droits a été approuvée par une assemblée des porteurs de ces titres, lorsque la loi nationale prévoit une telle assemblée, ou par les porteurs de ces titres individuellement, ou encore si ces porteurs ont le droit d'obtenir le rachat de leurs titres par la société absorbante ».

        Le projet de fusion doit à ce titre viser « les droits assurés par la société issue de la fusion transfrontalière (...) aux porteurs de titres autres que des actions ou des parts représentatifs du capital social ou les mesures proposées à leur égard » (directive n° 2005/56/CE, art. 5, g) [50]).

        La Cour de justice précise que ces titres sont « entre autres titres, les obligations échangeables contre des actions, les obligations assorties de droits de souscription préférentiels au capital social, les obligations participant aux bénéfices ainsi que les droits de souscription » [51]. Les titres ainsi visés en droit belge sont les obligations convertibles et droits de souscription et les parts bénéficiaires [52].

        La Cour de justice ajoute, en termes plus généraux, que « de tels titres sont ceux qui confèrent à leurs porteurs des droits plus étendus qu'un simple remboursement des créances et des intérêts convenus. Il en va ainsi, en particulier, des titres qui reconnaissent à leurs porteurs le droit de les échanger contre des actions ou le droit de participer aux bénéfices de la société émettrice » [53].

        La juridiction de renvoi devra donc apprécier au regard de cette interprétation autonome [54] si des titres existant en vertu du droit national de la société émettrice, en l'espèce le droit chypriote, constituent des titres autres que des actions.

        C. Protection de la société

        12.Faculté d'extinction des titres

        L'article 226, § 3, de l'AktG invite à « accorder des droits équivalents aux titulaires de titres de dettes ou de titres participatifs » mais permet aussi de modifier les droits, voire de supprimer le titre [55].

        Le tribunal de commerce de Vienne a considéré que « KA Finanz n'était pas en droit de mettre fin aux obligations en cause dans le cadre de la fusion » et qu'au contraire « les emprunts avaient été transférés à KA Finanz dans le cadre de la transmission universelle du patrimoine », mais sans, semble-t-il, évoquer la question du droit applicable [56].

        La Cour Suprême autrichienne s'est interrogée sur la portée d'une telle disposition au regard du droit européen. La Cour de justice examine cette question au cas où les juridictions nationales autrichiennes parviendraient à la conclusion que les Notes seraient des titres participatifs (supra, n° 4) et souligne que l'article 15 de la troisième directive a pour objet de « préserver les intérêts des porteurs de titres, autres que des actions, auxquels sont attachés des droits spéciaux » [57] et que dans la mesure où « l'article 226, § 3, de l'AktG (...) semble conférer à l'émettrice de tels titres le droit de mettre fin de façon unilatérale à la relation juridique qui l'unit aux porteurs de ces titres et de désintéresser ces porteurs, (...) un tel droit est étranger au libellé et à l'objectif de l'article 15 de la directive n° 78/855 » [58].

        La Cour de justice considère donc à juste titre que l'article 15 de la troisième directive est une disposition qui « confère des droits aux porteurs de titres », mais non à l'émettrice de ces titres.

        En conséquence, « une disposition, telle que l'article 226, § 3, de l'AktG, ne saurait constituer une transposition de l'article 15 de la directive n° 78/855 » [59], mais n'est pas nécessairement en contradiction avec celui-ci [60].

        On observera enfin que les tribunaux autrichiens semblent avoir eu égard à la loi autrichienne pour considérer que l'on n'avait pas affaire à des titres participatifs (supra, n° 4). En réalité, la loi autrichienne n'avait pas vocation à régir la protection de ces titres, qui relèvent plutôt du droit chypriote (supra, n° 11).

        13.Observation sur la résolution bancaire

        La directive n° 2014/59/UE établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit [61] comporte un cadre strict à la fois quant aux conditions contractuelles de nature à réduire les droits des titulaires d'instruments de fonds propres additionnels de catégorie 1 ou de catégorie 2 et permet, le cas échéant, à l'autorité de résolution [62] de déprécier les instruments de fonds propres pertinents ou de les convertir en actions ou autres titres de propriété de l'établissement de crédit [63].

        Le droit applicable à l'établissement de crédit qui a émis les titres devra donc régler ces questions à l'avenir.

        [1] Avocat au barreau de Bruxelles (association d'avocats LIME), chargé de conférences - Executive Master en Gestion Fiscale de la Solvay Brussels School of Economics and Management (ULB).
        [2] Les éléments de l'arrêt commenté font déjà l'objet d'un commentaire d'actualité dans la présente revue par K. Szychowska, R.D.C., 2016, pp. 714-715.
        [3] Cette mesure s'inscrivait dans le plan de stabilité plus général de l'Etat autrichien qui avait été soumis à l'époque à la Commission: Commission Decision of December 2008 in case N557/2008 « Measures under the Law on the stability of the financial markets and on strengthening the interbank market for credit institutions and insurance companies in Austria », J.O.U.E., C. 3, 8 janvier 2009, p. 2.
        [4] Ce plan donna lieu à la décision en matière d'aide d'Etat du 31 mars 2011, C (2011) 2262 final, State Aid SA. 32745 (2011/NN) - Austria - Restructuring of Kommunalkredit Austria AG.
        [5] Kommunalkredit press release, 17 novembre 2009; décision du 31 mars 2011, précitée, State Aid S.A. 32745 (2011/NN), §§ 16 et 41 et s.
        [6] Art. 4, § 1er, b), des conditions d'émission, tel que reproduit dans l'arrêt commenté, sub § 21.
        [7] Art. 12, § 1er, des conditions d'émission, tel que reproduit dans l'arrêt commenté, sub § 23.
        [8] Directive n° 2005/56/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005 sur les fusions transfrontalières des sociétés de capitaux, J.O.U.E., L. 310, 25 novembre 2005, pp. 1 et s.
        [9] Art. 226 de la loi sur les sociétés par actions (Aktiengesetz) du 31 mars 1965 (BGB1.98/1965), dans sa version applicable à l'époque (l'« AktG »), intitulé « Protection des créanciers ».
        [10] Troisième directive n° 78/855/CEE du Conseil du 9 octobre 1978 concernant les fusions des sociétés anonymes, J.O.C.E., L. 295, 20 octobre 1978, pp. 36 et s.
        [11] Aux termes de l'art. 226, § 3, « il convient d'accorder des droits équivalents aux titulaires d'obligations et de titres participatifs ou de leur verser une compensation adéquate pour la modification des droits ou le droit lui-même ». Cet article vise en principe à transposer l'article 15 de la troisième directive sur les fusions (voir toutefois infra, n° 12).
        [12] Fairness Opinion, Beurteilung der Fairness von Bewertungsbandbreiten für die Ergängungskapitalemissionen der KIB, octobre 2010.
        [13] Voir les rapports des organes d'administration de KA Finanz et de Kommunalkredit, tous deux du 26 avril 2010, qui indiquent (p. 10): « The Management Board of the Acquiring Company and the Board of Directors of the Transferring Company have obtained a Fairness Opinion from external and independent experts in the field of Business Administration. Therein the values of the Notes were assessed as of the expected date of the legal effectiveness of this cross-border merger in line with general accepted business methods. On the basis of this valuation the value attributed to these Notes is nil. Consequently, these Notes will be terminated upon the legal effectiveness of this cross-border merger. Considering the value of nil attributed to these Notes the granting of equal rights through the Acquiring Company or the granting of a compensation payment for the termination of these Notes will not occur. ».
        [14] Concl. Av. gén. Yves Bot, § 22, in fine.
        [15] Convention sur la loi applicable aux obligations contractuelles ouverte à la signature à Rome le 19 juin 1980, J.O.C.E., C. 027, 26 janvier 1998, pp. 34 et s.
        [16] N. Staner, « Caractère multidimensionnel des fonds propres », in J.-P. Buyle (dir.), La loi bancaire: questions particulières, Collection Les Dossiers du Journal des Tribunaux, Bruxelles, Larcier, 2017, pp. 76 à 79.
        [17] Arrêt commenté, § 28.
        [18] Arrêt commenté, § 33, indiquant que le tribunal régional supérieur avait considéré que « seuls relèveraient de cette disposition les titulaires d'obligations dont les caractéristiques permettent d'assimiler ces titulaires à un associé ou qui les rendent semblables à des fonds propres, ainsi que les titulaires de titres participatifs conférant des droits qui font typiquement partie des droits financiers et patrimoniaux des actionnaires, et notamment celui de participer aux bénéfices et/ou au boni de liquidation ».
        [19] Règlement (CE) n° 593/2008 du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I), J.O.U.E., L. 177, 4 juillet 2008, pp. 6 et s. (le « Règlement Rome I »).
        [20] Directive n° 2011/35/UE du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2011 concernant les fusions des sociétés anonymes, J.O.U.E., L. 110, 29 avril 2011, pp. 1 et s.
        [21] Sachant toutefois que l'art. 13, 2., a été complété par un deuxième alinéa, qui dispose que: « Les Etats membres fixent les conditions de la protection prévue au paragraphe 1 et au premier alinéa du présent paragraphe. En tout état de cause, les Etats membres veillent à ce que les créanciers puissent saisir l'autorité administrative ou judiciaire compétente pour obtenir des garanties adéquates, dès lors qu'ils peuvent démontrer, de manière crédible, que la fusion constitue un risque pour l'exercice de leurs droits et que la société ne leur a pas fourni de garanties adéquates. »
        [22] Directive n° 2017/1132 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017 relative à certains aspects du droit des sociétés, J.O.U.E., L. 169, 30 juin 2017, pp. 46 et s.
        [23] Voir not.: European Commission, Feedback Statement, Summary of responses to the public consultation on cross border mergers and divisions, October 2015; rapport E. Gasbarra du 9 mai 2017 sur la conduite des fusions et scissions transfrontalières (2016/2065 (INI)), A8-019/2017; Parlement européen, résolution du 13 juin 2017 sur la conduite des fusions et scissions transfrontalières (2016/2065 (INI)).
        [24] On cite généralement pour cette analyse l'article de base de G. Beitzke, « Les conflits de lois en matière de fusion de société », R.C.D.I.P., 1967, I, pp. 1 et s.
        [25] Tels que: règles de convocation, de quorum et de vote aux assemblées générales; décisions et rapports du conseil d'administration; établissement des rapports des experts; éventuel contrôle préventif judiciaire ou administratif de la fusion; opposabilité de la fusion; pour ce qui concerne la société absorbée, protection des créanciers; pour ce qui concerne la société absorbante, dispositions relatives à la nature et à la négociabilité des titres nouveaux, ainsi que l'incidence de la fusion sur le nombre des administrateurs; nécessité d'un contrat préalable; inscription de la décision de fusion dans un registre; publication de la décision ou tout autre acte de publicité; conséquences de l'inobservation d'une condition de fond de la fusion, en ce compris la responsabilité des administrateurs.
        [26] Tels que: règles relatives à la forme et au contenu du projet de fusion, dispositions relatives à la date de prise d'effet de la fusion ou encore règles qui concernent la nullité de la fusion.
        [27] Voir pour une synthèse de ces questions et les références, T. Tilquin et J.A. Delcorde, « La fusion transfrontalière de sociétés de capitaux en droit belge après la transposition de la directive 2005/56/CE », Rev. prat. soc., 2009, pp. 43 et s.
        [28] Reprise désormais dans les dispositions de la directive n° 2017/1132/UE; voy. en droit belge la loi du 8 juin 2008 portant des dispositions diverses (L. 8 juin 2008 portant des dispositions diverses (I) (M.B., 16 juin 2008, p. 30.529, art. 75 à 78)) qui a introduit dans le Livre XI du Code des sociétés le Titre Vbis consacré aux « règles spécifiques concernant les fusions transfrontalières et opérations assimilées ».
        [29] T. Tilquin et J.A. Delcorde, o.c., Rev. prat. soc., 2009, pp. 49-50.
        [30] Désormais art. 1er, 2., f), du Règlement Rome I. Les termes « par enregistrement ou autrement » ont été insérés après le mot « constitution » tandis que le terme « organes » a été remplacé par le terme « agents ».
        [31] Arrêt commenté, § 52, visant le rapport des professeurs M. Giuliano et P. Lagarde sur la Convention de Rome.
        [32] Pour le domaine de la loi du contrat, voir art. 12, 1., du Règlement Rome I.
        [33] Désormais, art. 131, 1., de la directive n° 2017/1132/UE. En droit belge, art. 682, al. 1er, 3°, C. soc. applicable à la fusion transfrontalière en vertu de l'art. 772/3 C. soc.
        [34] T. Tilquin, Traité des fusions et des scissions, Bruxelles, Kluwer, 1993, pp. 289 et s.
        [35] Arrêt commenté, § 58; voy. p. ex. P. Van Ommeslaghe, Traité de droit civil belge. Les obligations, Bruxelles, Bruylant, 2013, pp. 1985-1986, nos 1376-1378; T. Tilquin et J.-A. Delcorde, « La fusion transfrontalière de sociétés de capitaux en droit belge après la transposition de la directive 2005/56/CE - (n°6990) », Rev. prat. soc., 2009, p. 87; D. Van Gerven, « De grensoverschrijdende fusie: begrip en rechtsgevolgen », in Grensoverschrijdende fusies zijn een feit, Herentals, KnopsPublishing, 2009, pp. 30-31; D. Willermain, « Les fusions transfrontalières de sociétés », J.T., 2009, n° 6365, p. 591.
        [36] Arrêt commenté, §§ 58 et 59.
        [37] Directive n° 2005/56/CE, art. 4, 1., b): « une société participant à une fusion transfrontalière se conforme aux dispositions et aux formalités de la législation nationale dont elle relève » (désormais art. 121, 1., b), de la directive n° 2017/1132/UE).
        [38] Désormais, art. 121, 2., de la directive n° 2017/1132/UE.
        [39] Désormais, art. 99, 1., de la directive n° 2017/1132/UE.
        [40] Désormais, art. 99, 2. et 3., de la directive n° 2017/1132/UE.
        [41] C. soc., art. 684.
        [42] C. soc., art. 613.
        [43] « Sans préjudice des règles relatives à l'exercice collectif de leurs droits, il est fait application de l'article 13 aux obligataires des sociétés qui fusionnent, sauf si la fusion a été approuvée par une assemblée des obligataires, lorsque la loi nationale prévoit une telle assemblée, ou par les obligataires individuellement » (art. 14 de la troisième directive, désormais art. 100 de la directive n° 2017/1132/UE).
        [44] Ainsi les conclusions de l'Av. gén. Yves Bot, qui réserve l'hypothèse suivante: « (les Notes) ne sont transmises à la société absorbante que pour autant que, au jour de la fusion, les fonds propres complémentaires ainsi constitués se trouvaient encore présents, ce qu'il appartient à la juridiction nationale de vérifier » (Concl. Y. Bot, § 42 et 56), ce qui suppose l'existence d'une disposition contractuelle expresse, les droits du créancier étant sans cela purement et simplement maintenus, sous réserve de l'interprétation de ses droits dans la nouvelle structure.
        [45] Art. 9 des conditions d'émission tel que reproduit dans l'arrêt commenté, sub § 22: « Inexécution. En cas de liquidation ou de dissolution de l'émettrice (sauf aux fins ou en conséquence d'une fusion, restructuration ou d'un assainissement alors qu'elle est solvable, dans le cadre duquel ou de laquelle l'entreprise qui subsiste reprend en substance tous les actifs et obligations de l'émettrice), tout porteur peut déclarer son titre échu et en réclamer le remboursement immédiat à hauteur du montant de remboursement anticipé (...) ainsi que des intérêts (éventuellement) échus à la date du remboursement ».
        [46] Désormais, art. 121, 2., de la directive n° 2017/1132/UE.
        [47] D. Willermain, « Les fusions transfrontalières de sociétés », J.T., 2009, p. 591; T. Tilquin et J.-A. Delcorde, o.c., Rev. prat. soc., 2009, p. 93; T. Tilquin, Traité des fusions et des scissions, o.c., pp. 545-546 (les formalités d'une autre lex societatis sont reconnues comme équivalentes et les formalités uniques sont limitées aux seules sociétés relevant de la lex societatis prévoyant ces formalités).
        [48] Arrêt commenté, § 61.
        [49] Désormais, art. 101 de la directive n° 2017/1132/UE.
        [50] Désormais, art. 122, g), de la directive n° 2017/1132/UE.
        [51] Arrêt commenté, § 65; la première version de la directive visait d'ailleurs expressément les porteurs d'« obligations convertibles en actions, d'obligations échangeables contre des actions, et obligations assorties de droits de souscription préférentiels au capital social, d'obligations participant aux bénéfices ainsi que les titulaires de droits de souscription » à l'art. 13 et les porteurs de « parts bénéficiaires non représentatives du capital social et les porteurs d'actions de jouissance ou de 'Genusscheine' de la société absorbée », à l'art. 14 (devenu ensuite l'art. 15), J.O.C.E., C. 89, 14 juillet 1970, pp. 22-23 et Recueil Sirey, 1970-5, pp. 25-26.
        [52] T. Tilquin, Traité des fusions et scissions, o.c., p. 139, n° 182; P. Van Ommeslaghe, « La réforme des fusions et scissions de sociétés en droit belge », in Le droit des affaires en évolution, Bruxelles, Bruylant, 1992, p. 110.
        [53] Arrêt commenté, § 66.
        [54] Voir sur cette notion, C.J.U.E., 29 octobre 2009, C-174/08, NCC Construction, Rec., p. I-10567, point 24; C.J.U.E., 18 octobre 2007, C-195/06, Österreichischer Rundfunk, Rec., p. I-8817, point 24.
        [55] Il n'existe par contre pas de disposition similaire en droit allemand, applicable en l'espèce comme loi du contrat des titres litigieux (voy. art. 23 de l'Umwandlungsgesetz: Smitt, Hörtnagl et Stratz, UmwG. UmwSEG, 6e éd., pp. 407 et s.).
        [56] Arrêt commenté, § 30 et 31; Concl. Av. gén. Yves Bot, § 25.
        [57] Arrêt commenté, § 69.
        [58] Arrêt commenté, § 70.
        [59] Arrêt commenté, § 70.
        [60] Sur cette question: L. Hübner, « Auswirkung einer grenzüberschreitenden Verschmelzung auf Anleiheverträge », IPRax, 2016, pp. 553 et s., en particulier p. 557.
        [61] Directive n° 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d'investissement et modifiant la directive n° 82/891/CEE du Conseil ainsi que les directives du Parlement européen et du Conseil nos 2001/24/CE, 2002/47/CE, 2004/25/CE, 2005/56/CE, 2007/36/CE, 2011/35/UE, 2012/30/UE et 2013/36/UE et les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) no 1093/2010 et (UE) no 648/2012, J.O.U.E., L. 173, 12 juin 2014, pp. 190 et s. (la directive n° 2014/59/UE).
        [62] Art. 3 de la directive n° 2014/59/UE.
        [63] En droit belge: art. 250 et s. de la loi du 25 avril 2014 relative au statut et au contrôle des établissements de crédit (M.B. 7 mai 2014, p. 36.794).