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Droit de la concurrence et secteurs régulés

Arrêt MEO de la Cour de Justice du 19 avril 2018

La Cour de Justice a clarifié les conditions dans lesquelles l’application de prix discriminatoires par une entreprise dominante à ses partenaires commerciaux peut être considérée comme constitutive d’abus de position dominante.

L’arrêt du 19 avril 2018 a été rendu suite aux questions préjudicielles posées par le Tribunal de la concurrence portugais dans le cadre d’un litige opposant MEO, un fournisseur de services de télévision, et l’Autorité de concurrence portugaise au sujet de la décision de classement sans suite par cette dernière de la plainte de MEO dirigée contre la société de gestion collective des droits d’auteurs portugaise. Dans sa plainte MEO alléguait notamment  que la société de gestion collective avait abusé de sa position dominante en lui imposant des conditions discriminatoires au sens de l’article 102(c) TFUE.

L’article 102(c) TFUE qualifie de pratique abusive l’application de « conditions inégales à des prestations équivalentes, en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence ». Le Tribunal de concurrence a questionné la Cour de Justice sur la notion de « désavantage dans la concurrence », et en particulier, (i) la nécessité d’analyser les effets concrets de l’application de prix différenciés sur la situation concurrentielle de l’entreprise affectée et (ii) la nécessité de prendre en compte la gravité de tels effets.

La Cour a souligné que, pour que les conditions d’application de l’article 102(c) TFUE soient réunies, il est nécessaire que le comportement de l’entreprise en position dominante tende à fausser la concurrence, c’est-à-dire à entraver la position concurrentielle d’une partie des partenaires commerciaux par rapport aux autres (arrêt du 15 mars 2007, British Airways/Commission, C-95/04 P, pt. 144). Ce faisant, la seule présence d’un désavantage immédiat résultant de l’application de prix supérieurs ne signifie pas pour autant que la concurrence soit faussée ou soit susceptible de l’être.

Il n’est pas requis que la preuve de la détérioration effective et quantifiable de la position concurrentielle des partenaires commerciaux pris individuellement soit apportée. Afin d’établir si le comportement de l’entreprise dominante est susceptible de produire un désavantage concurrentiel, l’ensemble des circonstances pertinentes doivent en revanche être prises en compte. Ainsi, l’autorité de concurrence peut apprécier la position dominante de l’entreprise, le pouvoir de négociation des partenaires commerciaux, les conditions et les modalités d’imposition de prix inégaux, leur durée et leur montant, ainsi que l’existence éventuelle d’une stratégie visant à évincer du marché en aval l’un des partenaires commerciaux au moins aussi efficace que ses concurrents (arrêt du 6 septembre 2017, Intel/Commission, C-413/14 P, pt. 139).

Enfin, la Cour de Justice a rappelé que, dans l’hypothèse où un désavantage concurrentiel peut être établi, il n’y a pas de seuil de minimis en ce qui concerne la gravité dudit désavantage (arrêt du 6 octobre 2015, Post Danmark, C-23/14, pt. 73), tout en soulignant que la discrimination doit effectivement affecter les intérêts de l’opérateur qui s’est vu imposer des tarifs supérieurs par rapport à ses concurrents.

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