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Le délai de prescription de 3 ans pour introduire une action en matière d’assurance vie n’est pas discriminatoire

La question soumise à la Cour constitutionnelle portait sur la prescription en matière d’assurance vie dans le cadre d’un litige relatif à des polices d’assurance vie en branche 23. Les preneurs d’assurance postulaient, par une action introduite en 2015, la nullité des polices et mettaient en cause la responsabilité pré contractuelle /contractuelle de l’entreprise d’assurance à la suite de la suspension des fonds d’investissement en 2009 et 2011. Cette action « dérivant du contrat d’assurance » au sens de l’article 88, § 1er, de la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances était soumise au régime de prescription prévu par cette disposition.

L’article 88, § 1er, en prévoyant un délai de prescription réduit (3 ans sauf dans certains cas) discrimine-t-il les personnes qui ont investi dans des produits d’assurance-vie de type branche 23, liés à des fonds d’investissement, par rapport aux personnes qui ont investi dans des instruments financiers ou produits d’épargne, liés aussi à des fonds d’investissement, et qui sont soumises au droit commun de la prescription prévus aux articles 1304 et 2262bis, § 1er du Code civil ?

La Cour constitutionnelle par son arrêt du 22 octobre 2020 (Aff. 140/2020)constate qu’un contrat d’assurance-vie de type branche 23 présente des similitudes, sur le plan économique, avec un contrat par lequel un particulier opère un placement dans un instrument financier ou dans un produit d’investissement lié à ou impliquant aussi un fonds sous-jacent à cet instrument ou produit.

Dans les deux cas, le contrat est lié à un fonds d’investissement ou de placement et le particulier supporte seul le risque financier.
Toutefois, les deux contrats se distinguent en raison des caractéristiques principales du contrat d’assurance-vie : possibilité de désigner un bénéficiaire autre que le preneur d’assurance, existence d’un aléa lié à la vie de la tête assurée, régime fiscal propre…

La « mifidisation » du droit des assurances par la directive 2016/97 du 20 janvier 2016 sur la distribution d’assurances (J.O., 2016, L. 26, p. 19) et ses règlements techniques n’implique pas que les régimes des assurances-vie de type branche 23 et des instruments financiers ou produits d’investissement liés à ou impliquant aussi un fonds sous-jacent à cet instrument ou produit devraient être complètement alignés, y compris sur le plan de la prescription.

Le souscripteur d’une assurance vie en branche 23 et la personne ayant conclu un contrat portant sur ces autres produits financiers se trouvent dans des circonstances objectivement différentes, compte tenu des caractéristiques respectives des produits dans lesquels elles ont investi et de la nature du contrat qu’elles ont conclu à cet effet, à savoir un contrat d’assurance ou un autre contrat.

Le délai de prescription de trois ans, à compter de l’évènement donnant ouverture à l’action ou, le cas échéant, de la prise de connaissance de cet évènement, sans toutefois en principe pouvoir excéder cinq ans à dater de l’évènement (le cas de fraude excepté), se justifie en raison de la volonté du législateur de prévenir le risque de déperdition des preuves en cas de sinistre et de la nécessité de garantir le bon fonctionnement des entreprises d’assurances.

Ce délai n’est pas à ce point bref qu’il empêcherait les personnes concernées d’introduire une action en justice, en cas de litige. Par ailleurs, les articles 88 et 89 de la loi du 4 avril 2014 prévoient des délais spécifiques (30 ans pour l’action relative à la réserve formée) et des causes de suspension ou d’interruption de la prescription.

La Cour constitutionnelle conclut dès lors que l’article 88, § 1er, de la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances n’entraine pas de discrimination injustifiée entre les deux catégories de personnes.

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