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Droit de la concurrence et secteurs régulés

Le Tribunal de l’Union européenne refuse d’appliquer la théorie des facilités essentielles et confirme l’abus de position dominante de la société nationale des chemins de fer de Lituanie

L’obligation réglementaire imposée à une entreprise en position dominante d’accorder l’accès à une infrastructure publique ainsi que d’assurer le bon état technique de cette infrastructure permet d’exclure l’application de la théorie des facilités essentielles, laquelle fixe un seuil plus élevé pour conclure au caractère abusif d’une pratique.

Dans son arrêt 18 novembre 2020 (Lietuvos geležinkeliai/Commission, T-814/17), le Tribunal a confirmé la décision de la Commission ayant constaté l’existence d’un abus de position dominante de la société nationale des chemins de fer de Lituanie sur le marché lituanien du fret ferroviaire.

La société nationale des chemins de fer de Lituanie est à la fois gestionnaire des infrastructures ferroviaires et fournisseur de services de transport ferroviaire en Lituanie. En 2008, en sa qualité de gestionnaire des infrastructures ferroviaires, cette société a procédé au démantèlement complet d’un tronçon d’une ligne ferroviaire que la société nationale des chemins de fer de Lettonie, un fournisseur de services de transport concurrent, prévoyait d’utiliser pour entrer sur un segment spécifique du marché du transport ferroviaire.

Le Tribunal a confirmé que la suppression de la voie ferrée litigieuse constituait un abus de position dominante dans la mesure où un tel comportement était de nature à faire obstacle à l’entrée sur le marché en rendant l’accès à ce dernier plus difficile et à entraîner ainsi un effet d’éviction anticoncurrentielle.

Le Tribunal a souligné que la société nationale des chemins de fer de Lituanie détient une position dominante sur le marché de la gestion des infrastructures ferroviaires qui découle d’un ancien monopole légal. En outre, cette société n’a pas investi dans le réseau ferroviaire qui appartient à l’État lituanien et a été construit et développé par le biais de fonds publics. Le Tribunal a également relevé que la société en cause ne jouit pas du libre exercice d’un droit exclusif de propriété, qui sanctionne la réalisation d’un investissement ou d’une création. En effet, en sa qualité de gestionnaire des infrastructures ferroviaires, elle a l’obligation, à la fois en vertu du droit de l’Union et du droit national, d’accorder aux tiers l’accès aux infrastructures ferroviaires publiques ainsi que d’assurer le bon état technique de ces infrastructures.

Dans de telles circonstances, le Tribunal a considéré que le comportement en cause ne pouvait être examiné à la lumière de la jurisprudence établie en matière de refus de fournir l’accès à des infrastructures essentielles.

Toutefois, dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction en matière de fixation d’amendes, le Tribunal, eu égard à la gravité et à la durée de l’infraction, a estimé opportun de réduire le montant de l’amende imposée à LG de 27 873 000 à 20 068 650 euros.

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