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La citation n’interrompt pas le délai de prescription de l’action récursoire de l’assureur en l’absence de paiement à la personne préjudiciée

Par son arrêt du 29 octobre 2018 (C.18.0212.F), la Cour de cassation clarifie les conditions d’application de l’article 88 § 3 de la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances (article 34, § 3, de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d’assurance terrestre) selon lequel, «l’action récursoire de l’assureur contre l’assuré se prescrit par trois ans à compter du jour du paiement par l’assureur, le cas de fraude excepté ».

Le délai de prescription commence à courir lorsque le paiement au profit la personne lésée a été effectué, même s’il n’est pas encore établi à ce moment que l’assureur dispose d’un motif de recours contre l’assuré (Cass.16 octobre 2017, RG C16.0189.F, RGAR 2018/9, p. 15522; B. Dubuisson et V. Callewaert, « La prescription en droit des assurances, RGAR 2011, p. 14702).

C’est donc le décaissement qui initialise la prise de cours du délai de prescription de trois ans de l’action récursoire. En effet, le droit à récupérer le paiement effectué au profit de la personne lésée nait à partir de ce payement et pas avant.

L’effet interruptif d’une citation en justice, signifiée à celui qu’on veut empêcher de prescrire ne saurait se produire avant que le délai de prescription ait pris cours (Cass. 26 février 2007, RG C.05.004.F).

La mention dans la citation introductive d’instance de décaissements futurs par anticipation (« le remboursement de toutes les sommes que l’assureur a dû et devra décaisser en raison du sinistre ») ne peut servir de fondement à une extension de demande au sens de l’article 807 du Code judiciaire. Ce sont les « conclusions prises par l’assureur avant la clôture des débats, dans lesquelles il prétend au paiement ou à la constatation de son droit, qui interrompent la prescription pour les sommes versées aux parties lésées postérieurement à la citation et au cours de l’instance » (Cass.,10 janvier 1992, F-19920110-15).

Si l’assureur a effectué plusieurs paiements successifs en vue d’indemniser les victimes, la date de chacun des paiements constitue le point de départ d’un délai de prescription distinct.

Dans le cas d’espèce soumis à la Cour de cassation, le jugement attaqué avait écarté la prescription pour les décaissements effectués après 2001 « au motif que l’assureur avait, dans sa citation introductive d’instance du 1er juin 2001 « … immédiatement fait valoir ses prétentions en réclamant une somme provisionnelle et en chiffrant la réclamation totale, et ce, sous réserves, dès lors que le dommage définitif des parties préjudiciées n’était pas fixé (expertise en cours) » en sorte que le demandeur « était donc avisé d’un complément de demande, outre la demande provisionnelle réclamée».

Par ce raisonnement, le jugement attaqué considérait que la citation introductive du 1er juin 2001 avait pu valablement interrompre le délai de prescription de trois ans de l’action récursoire de l’assureur.

Toutefois, l’action récursoire correspondait à des décaissements effectués de 2002 à 2012 et donc à des droits d’action qui n’étaient nés qu’après la citation (1er juin 2001).  Le délai de prescription de cette action récursoire ne pouvait dès lors ni prendre cours ni être interrompu, avant les naissances successives des droits à récupération en l’absence de conclusions déposées par l’assureur dans un délai de trois ans à compter de certains des décaissements.

Le Cour de cassation casse dès lors le jugement attaqué : lorsque l’action récursoire a pour objet le remboursement de paiements successifs effectués par l’assureur à une partie lésée par la faute de l’assuré, c’est la date de chacun de ces paiements qui détermine le point de départ de la prescription triennale.

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