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Déchéance de la garantie d’assurance responsabilité en cas de faute lourde, vers une liste détaillée des prescriptions minimales dont le respect est attendu par l’assureur ?

Par son arrêt du 16 mars 2018 (F-2018 0316-4, C.17.0428.F),  la Cour de cassation statue à nouveau sur l’exigence de détermination des clauses de déchéance.

Dans le cadre d’une police d’assurance responsabilité professionnelle architecte, la clause de la police était libellée comme suit : « il y a déchéance du droit à la prestation d’assurance pour […] 2.8.2. les dommages suivants :(…) avec connaissance préalable, ne pas respecter des dispositions légales de nature impérative, entre autres des prescriptions de sécurité, des prescriptions urbanistiques, des prescriptions du permis d’urbanisme et des prescriptions relatives à l’environnement (…) tout exercice illicite des activités assurées ».

Le tribunal correctionnel avait reconnu l’architecte coupable de ne pas avoir désigné de coordinateur de sécurité sur un chantier dont il avait été chargé de la conception et du suivi de la réalisation et où un magasinier-livreur fit une lourde chute. L’architecte avait été condamné à indemniser le dommage de ce dernier et de l’assureur loi.

L’assureur prétend à la déchéance de sa garantie en raison de la faute lourde commise par son assuré et exerce une action récursoire au motif  que l’assuré est un professionnel de la construction dont la mission est d’ordre public et est censé connaître les obligations de sécurité sanctionnées pénalement qui s’imposent à tout architecte. Il souligne qu’en l’espèce l’architecte n’ignorait pas que les mesures de sécurité obligatoires manquaient.

Selon lui,  la sécurisation d’un escalier (dont il n’est pas contesté que ce manquement est à l’origine du sinistre) est bien une prescription de sécurité, impérative et est constitutive d’une faute lourde visée par la police qui  autorise l’action récursoire.

L’arrêt de la Cour d’appel avait accepté cette action récursoire en considérant qu’« il ne peut être exigé de l’assureur qui s’adresse spécifiquement à des architectes d’énumérer dans la police toutes les obligations qui s’imposent à celui-ci en matière de sécurité, notamment sous peine d’imposer aux assureurs d’inclure, par exemple, le Règlement général pour la protection du travail, l’arrêté royal du 31 août 2005 relatif à l’utilisation des équipements de travail pour des travaux temporaires en hauteur, dans les polices » et que « [la demanderesse] est un professionnel de la construction et est censée connaître les obligations de sécurité qui s’imposent à tout architecte ».

Toutefois, la Cour de cassation considéra que « l’arrêt, qui en déduit que « le fait pour [la demanderesse] de ne pas avoir désigné de coordinateur-sécurité et d’avoir endossé ce rôle sans y être légalement habilitée », alors qu’elle « n’ignorait pas que les mesures de sécurité obligatoires manquaient », dont la « sécurisation d’un escalier » à l’origine du sinistre, « est constitutif d’une faute lourde visée par la police », ne justifie pas légalement sa décision que « [la demanderesse] doit être déchue de la garantie de son assureur qui exerce à bon droit l’action récursoire ».

En cassant cet arrêt,  la Cour de cassation met en évidence que même en cas d’assurance responsabilité professionnelle et de violation « consciente » par un professionnel de la construction d’une « prescription de sécurité » visée par le contrat et sanctionnée pénalement, il importe de vérifier si la clause de déchéance énonce bien des cas de « faute lourde déterminés expressément et limitativement par le contrat » (article 62 alinéa 2 de la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances)(Voy. V. Callewaert, « L’exigence de détermination des clauses de déchéance », note sous Liège, 28 mai 2008, R.G.A.R., 2010, n° 14626 ; N. Schmitz , « Le point sur la charge de la preuve des causes d’exonération de garantie » in Actualités en droit des assurances, C. Paris et V. Callewaert (dir.), Larcier, CUP, 2015, vol. 154, pp. 153-155; N.Schmitz, « La clause de déchéance qui sanctionne un manquement aux lois, règlements et usages exclut-elle, en termes trop généraux, la couverture de la faute lourde ? », J.L.M.B., 2014, p. 867 ; L. Henrotte, « Énumération exhaustive des cas de faute lourde dans la police d’assurance : un tableau réaliste, surréaliste, hyperréaliste ou abstrait ? », For. immo 2017, liv. 17, 8 ; G. Heirman, « Grove schuld: beding met verwijzing naar elke tekortkoming aan wetten, regels of gebruiken voldoet niet aan de wettelijke vereisten », Bull. ass. 2015, p. 298).

 

 

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